"Marie et les Naufragés" est un film tristement drôle et réjouissant. D'abord, parce qu'il ne se prend pas au sérieux. Ce long-métrage emmène les spectateurs dans les psychés haletantes de 5 personnages, un éternel amoureux, un musicien excentrique en proie à une drôle d'insomnie, une mannequin pas vraiment belle mais suffisamment étrange pour tourner dans des publicités de parfum, un écrivain inquiétant, et un réalisateur allumé. Ensuite, parce que le point de vue du réalisateur est volontairement ambigu, cherchant autant à générer le rire, l'ironie que l'émotion. Cette œuvre inqualifiable hésite entre la rêverie et l'inventivité à la Michel Gondry, la nouvelle vague parisienne revisitée à la sauce trentenaires, et l'escapade champêtre dans les terres bretonnes. Il s'agit d'une sorte de récit à tiroirs où les personnages finissent toujours pas se rencontrer et se retrouver à un endroit de la narration. Apparemment décousu, le scénario brille d'ingéniosité et de subtilité. On regrettera certainement quelques longueurs, notamment sur l'Ile de Groix, ou au contraire quelques coupes dans la narration qui mettent de coté des personnages qui auraient mérité un plus grand intérêt. Mais l'important dans ce film réside dans la légèreté qui le traverse, et surtout la volonté totalement assumée du réalisateur de fabriquer une œuvre, certes littéraire mais qui ne se prend pas au sérieux. Il y a du Boris Vian dans ces images qui côtoient la douceur des relations humaines, la rêverie, le surréalisme contemporain. Sébastien Betbeder aime ses acteurs. Pierre Rochefort occupe d'ailleurs le film d'un bout à l'autre avec un véritable amour du jeu, tout en distillant un goût sensible pour l'humanité. Il incarne un personnage attachant qui donne envie de faire confiance à l'amour. "Marie et les naufragés" n'est peut-être pas le chef d'œuvre de l'année, mais constitue un petit joyau féérique, qui fait du bien aux bleus à l'âme.