"Victoria" ou l'éloge du fameux Plan Séquence !
Car que va-t-on voir ? Une réalisation talentueuse et réussie ou un travail technique de spécialiste ?
Si ce que chacun semble mettre en avant dans sa critique, relève toujours de ce fameux procédé cinématographique, c'est à mon sens un problème puisque celui-ci devrait se faire oublier, ou juste à la rigueur être évoqué...
On ne parle pas d'une peinture en mettant en évidence sa technique, car celle-ci s'efface à juste titre devant l'émotion, la beauté, le ressenti qui nous touchent avant tout...
Même si personnellement, je reconnais ne pas avoir été insensible à ce défi dont le pari a été finalement tenu, j'ai eu l'impression que le réalisateur a mis toute son énergie à aller jusqu'au bout du bout, quitte à empiler des incohérences scénaristiques pour pousser au plus loin cette expérience !
Si bien que rien ne nous est épargné durant ce tournage en temps réel, les situations se succédant donc chronologiquement sous forme de tableaux plutôt inégaux, avec des baisses de rythme ou de tension très nets, passant de l'ennui quelquefois à des instants très intenses par ailleurs.
Côté scénario, Victoria étudiante espagnole et pianiste émérite, arrivée à Berlin avec un petit boulot à la clé, peut bien sûr se sentir très attirée par cette bande de Berlinois peu recommandables, mais franchement, la situation dans laquelle elle s'enferre et elle s'enferme, ne tient pas debout ou tout au moins pas pour aller si loin dans ces extrémités tellement insensées...
Et pourtant, on se doute bien dès le début que justement tout l'enjeu au delà de la technique, reposera sur cette jeune femme jusqu'à deviner sans difficultés l'issue qui se programme inévitablement sous nos yeux.
Tout cela finit par décevoir quand on a compris les intentions de Sebastian Schipper, alors que la forme assure sans problème et que le fond avait tout pour séduire, si l'histoire avait seulement pris un tournant moins farfelu, mais plus réfléchi et en adéquation avec les caractéristiques de ce personnage central.
Ni bon, ni mauvais en soi, ce curieux film relève plus d'un prototype, d'un concept cinématographique pour utiliser encore un mot tendance, plutôt que d'un cinéma réellement abouti avec les sensations et les émotions espérées...
Les acteurs ont de plus une façon de jouer et de s'impliquer assez forte et sincère pour le signaler, en particulier Laia Costa très convaincante.
Beaucoup d'éléments qui mis ensemble avaient tout pour fonctionner et donner le meilleur du meilleur.
Sans doute, encore comme dans la peinture, fallait-il savoir poser les pinceaux juste au bon moment sans trop en faire, tout ce qui fait d'ailleurs la différence, la magie et la vraie réussite !
Se complaire dans ses idées ou même ses délires, sans doute mais encore faut-il que le spectateur lui aussi s'accroche jusqu'au bout...
Écouter un passionné parler trop longtemps de sa passion n'est pas forcément passionnant !