Ce film a été sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs du Festival de Cannes 2014.
Comme pour l’un de ses précédents films, La BM du Seigneur (2011), le réalisateur Jean-Charles Hue a fait appel à des gens du voyage pour interpréter tous les rôles. C’est sa deuxième collaboration avec la famille Dorkel, et notamment Frédéric Dorkel (tête d’affiche de La BM du Seigneur). Il est important pour le cinéaste de solliciter des acteurs non professionnels (sauf Christian Milia-Darmezin qui est un professionnel), car ce qui l’intéresse "c’est que la fiction et la réalité se mélangent", dit-il. On remarque d'ailleurs que les personnages ont le même nom que leur interprète.
Faire appel à des acteurs non professionnels peut compliquer les conditions de tournage, comme ce fut le cas pour Mange tes morts. Le réalisateur raconte : "Le film a bien failli s’arrêter plusieurs fois car ce ne sont pas des acteurs dociles, entre bagarres et courses poursuites. Avant chaque scène, je prends un moment pour leur expliquer quelle est l’importance de la scène, qui doit prendre la parole, qui doit être plus en retrait et je leur lis les répliques, qu’ils réinventent le plus souvent. (…) Pour eux, le plus important c’est d’être crédibles, que les situations soient cohérentes psychologiquement et que les cascades ne leur fassent pas honte, eux qui sont nés avec un volant entre les mains. Par exemple, lorsque le jeune Jason devait s’énerver contre son frère parce qu’il a tué un gadjo, il résistait : "Je ne vais pas m’énerver et crier contre ma famille pour un gadjo [celui qui n’appartient pas à la communauté des gens du voyage] !""
L’expression "mange tes morts" est une insulte, qui signifie qu’on envoi l’autre renier ses ancêtres. Le cinéaste explique : "Si les gitans vivent beaucoup au jour le jour, il n’en reste pas moins que leur attachement aux parents, aux ancêtres est fondamental et qu’il s’agit d’un socle pour la communauté. Celui qui mange sa parole ou la mémoire des anciens n’est plus un homme". Cet attachement aux racines est central dans le film pour Jean-Charles Hue, c’est pourquoi il tenait le mettre en avant avec ce titre.
Jean-Charles Hue était passionné par les westerns lorsqu’il était plus jeune. Sa rencontre avec les gens du voyage a donné corps aux questionnements de ses héros, comme ceux présents dans La Horde sauvage (1969). De plus, l’ambiance particulière du monde des gitans s’apparente pour le réalisateur à celle de polars dans la lignée du Cercle Rouge (1970) de Jean-Pierre Melville.