Que faut-il vraiment voir dans « Eau argentée » ? Qu’à l’heure du tout numérique, il est impossible aujourd’hui de cacher les horreurs de la guerre ou d’une dictature, qu’émergent désormais de ci de là des images ou témoignages insoutenables venant les corroborer ? Ou bien alors, le sentiment terrible de lâcheté qui saisit ceux qui ont fui ou n’ont osé affronter un pouvoir tyrannique ? Ou encore le courage incroyable de ces populations exsangues qui luttent pour la liberté ? « Eau argentée » c’est tout cela à la fois mais surtout bien plus ! Car malgré des scènes insoutenables qui vous font détourner le regard, malgré toutes ces personnes qui évoluent et meurent à l’écran, malgré la désolation de villes en ruine… le film est traversé par l’amour et l’espoir. L’amour avec cette amitié si belle et si forte, d’abord, qui lie les deux réalisateurs (l’un en France, l’autre à Homs en Syrie) se réconfortant mutuellement, l’amour pour un pays meurtri mais dont l’espoir qu’il se redresse un jour reste infaillible, l’amour d’un peuple qui revendique une solidarité de tous instants et affiche une dignité bouleversante… dont le moment le plus fort sera la déclaration de Wian Simav Bedirxan qui tient à rentrer chez elle quels que soient les risques. Signe fort d’un espoir du renouveau, d’une paix qui finira par arriver, d’une vie, certes mutilée, mais retrouvée. Ce documentaire implacable est tout à la fois traumatisant, comme le fut en son temps « Nuit et brouillard », et rassérénant. Il touche à l’absolu de l’émotion nous poussant dans nos retranchements, provoquant notre désapprobation, titillant notre couardise. Gandhi disait, « la loi de l’amour se montre plus efficace que ne l’a jamais été la loi de la destruction », ce film exceptionnel s’en veut la meilleure illustration.