On pourrait croire que ce sont les élucabrations d'Eric Zemmour et les pathétiques fantasmes de celles et ceux qui s'élèvent contre une prétendue théorie du genre qui sont à l'origine, en guise de riposte, de « Une nouvelle amie », le dernier film de François Ozon et de « Les Nuits d'été », le premier long métrage de cinéma de Mario Fanfani. Il n'en est probablement rien, le cinéma n'ayant pas attendu 2014 pour faire tourner des hommes se travestissant en femmes : « Tootsie », « Chouchou », « Priscillia, folle du désert », « La cage aux folles », plusieurs films d'Almodovar, etc., sans parler des films où le travestissement est utilisé à des fins utilitaires. Dans « Les nuits d'été », Michel, un notaire de province, vie familiale sans reproche, est tout proche d'atteindre son Graal : la présidence de la Chambre des notaires locale. Michel a un secret : il aime se déguiser en femme et, régulièrement, se faisant appeler Mylène, il rencontre Jean-Marie, un autre homme lui aussi déguisé en femme. Rien de sexuel, là dedans, juste le plaisir d'être … une autre. Cette habitude, toutefois, porterait bien sûr un coup fatal à son ambition si elle était découverte. Hélène, la femme de Michel, est persuadée qu'avec son mari, ils se disent tout. Sauf que, bien sûr, elle n'est absolument pas au courant de la marotte de son mari. Nous sommes en 1959, en pleine guerre d'Algérie, et, lors d'un repas entre notables locaux, Hélène, toute en sincérité, refroidit l'assistance en disant tout ce qu'elle a sur le cœur concernant la situation de l'autre côté de la Méditerranée. La grande scène du film ! Un film dans lequel on a la surprise de trouver Guillaume de Tonquédec dans le rôle de Michel : on ne s'attendait pas, sûrement à tort, à ce que Renaud Lepic soit friand de robes et de talons hauts. En tout cas, l'acteur est très convaincant, aussi bien dans son rôle de femme qu'en notaire de province. Moins surprenant, le choix de Jeanne Balibar pour interpréter le rôle d'Hélène. La musique du film est due à Rodolphe Burger, celui qui était le leader du défunt groupe Kat Onoma. Tout cela semble porter le film vers un jugement très élogieux. C'est là que le bémol arrive : au niveau de la réalisation, on ressent malheureusement un manque de rythme et un manque d'inventivité qui viennent brider la sympathie qu'on avait pour le film. On notera toutefois que, présenté à la dernière Mostra de Venise dans le cadre de la Journée des Auteurs, « Les nuits d'été » y a obtenu le Queer Lion, récompense remise à un film dont le thème est l'homosexualité ou le transgenre.