Après avoir écrit Sueurs et dirigé Clémence Poésy dans Lullaby, Benoit Philippon est passé avec Mune au cinéma d’animation pour la première fois. Il fut épaulé dans sa tâche par Alexandre Heboyan, anciennement animateur à Dreamworks sur Kung Fu Panda.
L’envie première qui a porté Benoit Philippon vers le cinéma d’animation vient d’un désir de laisser son imagination prendre le pas et d’écrire de manière "plus débridée qu’en live". C’est Aton Soumache, ici producteur, qui l’a encouragé à réaliser Mune lui-même.
Avant de se plonger dans le grand bain de l’animation, Benoit Philippon avait imaginé l’histoire d’un enfant vivant dans la forêt et décrochant la lune à l’aide d’un simple filin. Cette idée devait faire l’objet d’un court-métrage et se tourner dans des conditions réelles. Infaisable techniquement, elle a évolué en un long-métrage d’animation.
Les caractéristiques et l’esthétique des personnages, répondant à une logique environnementale, ont servi de point de départ à Benoit Philippon pour imaginer le récit. Ils permettent aussi "de créer un univers visuel en 3D qui se différencie des productions américaines, et notamment de Pixar, qui depuis une quinzaine d’années a établi des normes visuelles qu’on connaît tous", explique Alexandre Heboyan.
Pour Benoit Philippon, il y a une grande différence entre le cinéma live et le cinéma d’animation. Le premier exige selon lui un travail approfondi avec les acteurs, "outil premier" du metteur en scène. Ce travail s’opère pour le second avec les chefs d’équipe qui imaginent, avec le réalisateur, la construction des personnages.
Trente-deux animateurs répartis en six équipes ont travaillé chacun sur un personnage précis durant la production. Une disposition qui a facilité selon Alexandre Heboyan l’évolution du projet, chacun sachant exactement comment animer et faire évoluer logiquement son personnage. Un an et demi de pré-production (création de l'univers et des personnages non-animés) aura auparavant été nécessaire.
Loin d’être un expert en animation, Benoit Philippon a beaucoup échangé avec Alexandre Heboyan (et Jérôme Fansten, co-scénariste) durant les premières étapes : "J’étais un peu celui qui avait l’univers dans la tête et Alex prenait cet univers et se l’appropriait à son tour". Une fois le story-board établi, Heboyan est parti travailler à Montréal sur l’animation, envoyant les plans terminés à son collègue qui les validait ou non en retour.
Benoit Philippon cite comme inspiration Kung Fu Panda pour la construction de Mune, un personnage maladroit qui va se construire une identité forte sur son chemin. Une production Dreamworks sur laquelle a travaillé Alexandre Heboyan, co-réalisateur du film. Edward aux mains d'argent fut aussi une référence pour le côté maladroitement étranger au monde du personnage.
Entourés de professionnels à l’impressionnante carrière (Emmanuel Curtil, Patrick Poivey…), Michael Gregorio et Omar Sy n’ont pourtant rien de débutants du doublage. Le premier a prêté sa voix aux films Gnomeo et Juliette et Hop lorsque le second utilisa son organe vocal pour Frère des Ours et Lascars, entre autres. Seul Izia Higelin a fait ses premiers pas de doubleuse en animation sur Mune.
Fruit d’ajustements permanents destinés à conserver un certain équilibre, le résultat a cherché à éviter "au maximum de surcharger l'image avec une abondance d’informations", selon Rémi Salmon, directeur artistique du film. Ce dernier a conçu un color script, cahier composé de planches proches en couleurs et en lumières du film fini, afin de servir de référence à l’équipe.
L’idée de contraste entre deux univers fut renforcée lors du travail de stéréoscopie qui voit la 2D devenir 3D, l'image plate devenir relief. L’envie d’Alexandre Heboyan fut de profiter un maximum de cette technologie au sein de l’univers du Soleil dans le but de donner du relief aux grands espaces qui composent ce monde. A l'opposé, la nuit (symbole de "l’absence de vie") a bénéficié de moindres espaces. Seules les séquences de rêves sont animées en deux dimensions, renforçant là aussi leur singularité à l'échelle de l'ensemble.
La lumière pénètre une pièce et fait rebondir ses rayons sur les surfaces, éclairant l’univers physique alentour. Ce phénomène peut être efficacement reproduit grâce à la transluminescence (ou subsurface scattering), technique d’animation qu'a énormément utilisée l’équipe de Mune : "Il fallait pouvoir éclairer l'ambre, la cire ou la lave de manière réaliste", explique Jonathan Germain, superviseur de l’infographie.
Omar Sy et Izïa Higelin, qui doublent respectivement les personnages principaux de Sohone et Cire, s'étaient donné la réplique dans Samba. Le premier campait le rôle-titre tandis que la seconde s'est glissée dans la peau d'une personne dynamique au caractère bien trempé qui aide les sans papiers.