Terre des Ours, qui sortira le 26 février 2014, est le premier documentaire de Guillaume Vincent à avoir l’honneur de sortir en salle. C’est également le premier documentaire à être filmé en 3D avec le soutien technique, excusez-nous du peu, de James Cameron. Nous étions à l’avant-première niçoise.La Terre des Ours, c’est le Kamtchatka, en extrême-orient russe. La Terre des ours bruns. Perdue entre les geysers et les volcans encore en activité. Un territoire sauvage et brut, encore vierge de la main de l’Homme. Le documentaire commence à la fin de l’hiver, début de l’année pour nos acteurs improvisés.. Après une longue hibernation, pouvant durer jusqu’à huit mois d’un hiver sibérien très rigoureux. Dans sa caverne, des enfants attendent impatiemment que leur mère se réveille. La caméra s’éloigne peu à peu de ce lieu d’intimité, et dès lors nous suivons plusieurs ours avec davantage de distance. Cette distance permet de donner de l’ampleur aux paysages magnifiques parmi lesquels les ours vivent.Marion Cotillard raconte l’histoire des différents protagonistes ursinés : une mère et ses deux enfants, un jeune adulte et un vieil ours. Pour tous, c’est une course pour la survie individuelle, et pour celle de l’espèce. Il s’agit de manger le plus possible pour passer le prochain hiver. Pour le vieil ours, puissant et informé, il n’y a pas urgence. Il sait quoi faire, et prend le temps de flâner, et de renouer viscéralement avec la nature triomphante du printemps. On le suit s’ébrouer dans l’eau, et se frotter aux arbres avec un plaisir non dissimulé. Le jeune ours est quant à lui hésitant, entre le désir de s’amuser et la nécessité se faisant jour de trouver de quoi se restaurer. La mère, enfin, se sacrifie, et pêche pour ses enfants. La tâche s’avère difficile lorsque de vieux mâles tentent de lui subtiliser les meilleurs emplacements. Au bord de la rivière, tous attendent avec impatience, l’arrivée des saumons.Les saumons sont les autres héros du documentaire. En pèlerinage, ils reviennent sur les lieux de leur naissance. Ils remontent les cours d’eau, dans une course effrénée dont certains, épuisés, ne verront pas la fin. Soit parce qu’ils mourront de fatigue, soit parce qu’ils seront la proie des ours. Les survivants pondront et perpétueront l’espèce. L’une comme l’autre espèce rentrent donc chaque année dans le cercle sans fin d’une sublime absurdité : la perpétuation de la vie pour elle-même, malgré les souffrances endurées par les individus. C’est un peu le cœur du documentaire, la beauté de la vie, la nécessité impérieuse de sa continuité. À la suite de Barjavel, et de son incroyable essai intitulé La faim du tigre, le commentaire de la voix-off pose la question, insidieusement : ce que vivent les ours, dans ces terres magnifiques du Kamtchatka, n’est-ce pas la malédiction qui sévit sur tout le règne du vivant ?Retrouvez nos autres critiques sur Une Graine dans un Pot :