En quelques minutes, "The Road Within" nous dévoile tout le calvaire régissant l'existence entière de Vincent (Robert Sheehan). Atteint du syndrome de la Tourette, le jeune homme assiste aux obsèques de sa mère et se contorsionne assis sur le banc de l'église pour s'empêcher de hurler des insanités qui gâcheraient ce moment dramatique. Ne pouvant se contenir, il sort du bâtiment et se défoule à l'extérieur dans un déferlement de tristesse mêlée aux manifestations de son handicap...
À la suite de cette brillante introduction qui parvient à nous faire immédiatement ressentir le combat intérieur perpétuel de Vincent, le jeune homme est envoyé par son père (un politicien qui ne voit désormais plus son fils que comme et pour son handicap) dans une clinique spécialisée pour trouver un moyen de guérir. Là-bas, il partage sa chambre avec Alex (Dev Patel) atteint de T.O.C. très sévères notamment en matière de propreté et rencontre la jolie Mary (Zoë Kravitz) souffrant d'anorexie. Une nuit, tous trois prennent la fuite pour permettre à Vincent de se rendre en Californie suite à une promesse faite à sa mère...
Remake du film allemand à succès "Vincent will Meer", "The Road Within" prend la forme d'un road trip synonyme d'un voyage intérieur bien plus important que n'importe quelle destination pour ses personnages et typique de bon nombre de feel-good movies issus du cinéma indépendant US. C'est d'ailleurs cet apparent cheminement connu qui va paradoxalement faire sa différence car, ici, les habituels traumatismes émotionnels que traînent les protagonistes dans ce genre de récit se retrouvent incarnés dans les handicaps même des trois adolescents, ces sortes de freins tout autant physiques qu'internes qui les ont mis en stand-by du monde extérieur alors qu'ils ne demandent pourtant qu'à le rejoindre. Ce sera bien évidemment au cours de ce voyage qu'ils vont connaître le goût de la normalité en cohabitant ensemble, partager mutuellement leurs tourments intérieurs qui, quelque part, les enfermaient un peu plus dans leurs conditions respectives et, enfin, vivre pleinement et tout simplement cette insouciance jusqu'alors mise en parenthèse de leur jeunesse -les rires collectifs, leurs premiers émois amoureux, sexuels, etc- en étant affranchis des contraintes des regards extérieurs. Subtil et sans jamais sombrer dans le pathos, "The Road Within" insuffle une bonne dose d'autodérision et de réalisme à ces personnages capables de sourire de leurs handicaps comme d'avoir pleinement conscience de l'isolement dans lequel ils se sont retranchés. Ainsi, il devient vite impossible de ne pas être touché lorsque le fruit de leurs interactions paraît agir comme un petit miracle les laissant entrevoir un avenir plus radieux où leurs conditions deviendraient un élément secondaire et non le principal gouvernail de leurs existences (ce que devrait être par ricochet n'importe quel regard sur le handicap en somme).
Néanmoins, et sans mauvais jeu de mots, "The Road Within" est parfois handicapé par un point de vue adulte dénué de finesse qui contraste avec celui des jeunes héros. À la recherche de son fils, le père de Vincent subit un traitement bien moins convaincant que les autres personnages en passant d'une facette autoritaire caricaturale à une autre bien plus mièvre. Il en résulte une transformation aussi rapide que radicale à laquelle il est bien difficile de croire (le talent de son interprète, Robert Patrick, parvient toutefois à lui donner un peu de contenance). En définitive, il aurait peut-être fallu éluder les scènes des adultes durant le road-trip pour privilégier encore un peu plus la force de l'explication finale où le changement de tempérament du personnage aurait pu mieux se comprendre.
Mais ce n'est qu'un détail face à un si joli premier film comme "The Road Within", emporté par le talent de ses trois comédiens principaux et par une réelle sensibilité nous rappelant une donnée qui devrait être une norme, de simplement regarder l'être humain avant son handicap.