J’ai beaucoup de respect pour Ridley Scott, pour l’ensemble de son oeuvre, mais là il s’est embarqué dans un projet particulièrement médiocre, un raté pour autant dire. Non pas que je critique son travail, au contraire, les scènes sur Mars ou dans l’espace sont filmées d’une main de maître, le scénario, par contre c’est une toute autre histoire. Le titre « Seul sur Mars » nous évoque déjà la solitude, l’hostilité, la difficulté, la lassitude, le désespoir, mais ce n’est malheureusement d’aucun de ce ces points de vue qu’a été abordé le sujet. Il a été préféré au défi psychologique du personnage principal la difficulté technique
à faire parvernir un vaisseau sur Mars en assez de temps avant qu’il ne crève de faim, tout en maximisant les chances de l’équipage
de rester en vie face à une aventure aussi périlleuse. C’est la détresse de la Nasa à trouver une solution qui a davantage l’air d’être le centre d’intérêt, au détriment de celle de cet astronaute esseulé dans une planète toute entière. Il en découle les fameuses scènes dans la salle de contrôle où les centaines de techniciens lèvent les bras de joie, qu’on connait tellement bien qu’elles nous fatiguent, les classiques débats entre scientifiques sensés nous inquiéter des difficultés inattendues rencontrées
avant qu’un éclair de génie d’une seule personne parmi des centaines de scientifiques, vienne tout solutionner, avec cette scène surréaliste où en jouant comme un enfant devant le directeur de la Nasa, le jeune noir explique qu’il est possible de profiter de la gravité d’autres planètes pour reprendre de l’élan...quel scoop ! C’est un procédé classique utilisé depuis des dizaines années dans tous les voyages spaciaux. Aussi
, cet hommage traître adressé aux chinois
, genre vous nous sauvez par bonté, merci, mais on ne peut pas s’empêcher du coup de nous moquer de vos vieux procédés, qu’on étiquette devant ce cher public, comme étant obsolètes depuis les années 60, ce
qui confirme qu’en 2015, cette fâcheuse habitude qu’ont les américains à dénigrer, dans leurs films, les grandes puissances devant la leur n’a toujours pas disparu. C’est en quelque sorte un hors-sujet, puisque le film focalise sur des problèmes à répétition pour lesquels il faut incessamment trouver des solutions, et il a beau nous faire la promotion de l’originalité de ces dernières, de l’imagination créative qui les a fait naître, nous on est tout juste blasé, si ce n’est vexé de faire passer pour possibles des choses aussi invraisemblables,
surtout quand on pense aux millions de dollars dépensés pour ce sauvetage, par rapport au risque trop élevé d’échec ou celui de perdre encore plus de vies d’autres astronautes
. Hors-sujet également car rien n’est fait pour nous faire ressentir la solitude du héros, il n’est même pas
seul en fait, car du moment qu’il arrive à communiquer avec la Terre, il se retrouve entouré, ça le rassure, ça le protège d’être
désespéré, il vit bien la chose, ni lui, ni nous du coup, ne sentent de véritable danger environnant venant menacer sa survie, d’ambiance opressante peser sur son moral, de mort inévitable le guettant, le suspense est tué dans l’oeuf. C’est un optimisme infaillible et l’humour qui va l’aider dans sa mésaventure, un humour gonflant, lourd et insipide, que ce soit le sien ou celui des autres personnages, d’ailleurs je peux en dire autant pour les dialogues. On a déjà vu le génie d’un « 127 heures » surprenant, la justesse d’un « Seul au monde » plaisant, avec des fins émouvantes et poignantes. « Seul sur Mars », avec son héros qui a un peu trop la patate pour nous inquiéter de son sort, est carrément sur une autre planète, où l’émotion ne survit pas assez pour tenir la corde et finalement nous atteindre.