L'Homme qu'on aimait trop est présenté dans la catégorie "Hors Compétition" au Festival de Cannes 2014. Et ce n'est pas la première fois qu'André Téchiné voit un de ses films projeté sur la Croisette puisqu'il a déjà reçu le Prix du meilleur réalisateur en 1985 pour Rendez-vous.
L'affaire dite "Le Roux" reste une énigme judiciaire. En effet, l'enquête sur la disparition en 1977 d'Agnès Le Roux, héritière du Palais de la Méditerranée, mettant en cause son amant de l'époque, l'ex-avocat niçois Jean-Maurice Agnelet, est entre les mains de la justice depuis une trentaine d'années et a déjà fait l'objet de trois procès. Encore aujourd'hui, les protagonistes de l'affaire font parler d'eux, si bien que le 7 avril dernier, le fils d'Agnelet a accusé son père d'avoir commandité l'assassinat d'Agnès Le Roux. Le dernier rebond de l'affaire date du 12 avril 2014, date à laquelle Jean-Maurice Agnelet s'est pourvu en cassation. Ce dernier a été condamné à 20 ans de réclusion criminelle.
Avec L'Homme qu'on aimait trop, le réalisateur André Téchiné se confronte une deuxième fois à l'adaptation cinématographique d'un fait divers après La Fille du RER sorti en 2009, qui revenait sur la médiatisation d'une fausse agression à caractère antisémite en juillet 2004 inventée par une victime qui avait menti sur toute la ligne.
L'équipe de L'Homme qu'on aimait trop a posé ses caméras sur la Côté d'Azur en mai 2013, notamment dans le Vieux-Nice, à Grace puis à Menton. Pendant quatre semaines, le tournage a également eu lieu à Paris.
L'Homme qu'on aimait trop marque la septième collaboration entre le cinéaste André Téchiné et l'actrice Catherine Deneuve, après La Fille du RER (2009), Les Temps qui changent (2004), Les Voleurs (1996), Ma saison préférée (1993), Le Lieu du crime (1986) et Hôtel des Amériques (1981).
Le titre du 20ème long-métrage d'André Téchiné fait référence au thriller américain L'Homme qui en savait trop, réalisé par Alfred Hitchcock en 1956. A noter que le film est passé par plusieurs titres provisoires tels que "L’ombre d’un doute" ou encore "French Riviera".
C'est une initiative rare pour un cinéaste de renom comme André Téchiné mais une partie du financement de L'Homme qu'on aimait trop a été récoltée grâce à Ulule, un site de financement participatif faisant appel aux dons des internautes. Le projet de financement, estimé à 25 000 euros au départ, a été interrompu en juin 2013 à hauteur de 27% de dons sur la plateforme de crowdfunding. Le 20ème film du cinéaste est néanmoins parvenu à boucler son budget.
A l'origine, c'est une libre-adaptation des mémoires de Renée Le Roux, "Une Femme face à la Mafia",
publiées par cette dernière et son fils Jean-Charles chez Albin Michel le 11 avril 1989, que l'on propose à André Téchiné de réaliser. Le cinéaste français raconte avoir été principalement motivé par le personnage d'Agnès Le Roux, dont il voulait faire le portrait : "J’ai donné mon accord définitif après avoir lu les lettres qu’elle écrivait à Agnelet, parce que contre toute attente j’y ai retrouvé des échos troublants avec un personnage que j’ai longtemps rêvé de porter à l’écran, Julie de Lespinasse."
Pour mettre sur pied le scénario de L'Homme qu'on aimait trop, le réalisateur André Téchiné a fait appel à Jean-Charles Le Roux, le frère d'Agnès Le Roux et co-auteur des mémoires de sa mère Andrée Le Roux : "Nous avons établi un séquencier, une chronologie des faits, une structure. Jean-Charles Le Roux est engagé aux côtés de sa mère dans son combat pour faire condamner Agnelet, il est persuadé qu’il a tué Agnès, j’ai donc été très clair avec lui dès le début : je ne ferai pas un film à charge contre Agnelet." Ensuite, pour peaufiner "la chair des scènes", le réalisateur s'est appuyé de Cédric Anger, notamment réalisateur du policier L'Avocat et du thriller Le Tueur.
Le réalisateur André Téchiné a choisi de centrer son récit sur le triangle composé par Agnès Le Roux, Andrée Le Roux et Maurice Agnelet, ce qui explique qu'il ait évincé de son histoire les personnages des frères et soeurs d'Agnès ainsi que des deux frères de Maurice Agnelet. Autre liberté prise par rapport à l'histoire originale : "la fermeture du casino et son occupation par le personnel ont lieu plus tard dans la réalité. Dramatiquement, il me semblait important de raconter la "chute" du Palais de la Méditerranée dans la même temporalité que la disparition d’Agnès."
A la question "Quel est votre Téchiné préféré ?", Adèle Haenel répond sans hésitation Les Roseaux sauvages, tandis que Guillaume Canet, "qui a une grande fascination pour Patrick Dewaere", choisit Hotel des Amériques.
Remercié dans le générique pour sa participation au scénario, Guillaume Canet nous a donné quelques précisions sur cette contribution : "J’ai proposé certaines choses au moment de l’écriture du film. J’ai réagi à certaines scènes et proposé certaines choses."
Pour incarner Agnès Le Roux, la comédienne explique avoir changé son approche du rôle : "C’est la première fois pour moi que j’interprète quelqu’un qui a vraiment existé. Evidemment la démarche change, explique-t-elle à notre micro. Je me sens un peu responsable de ce que je raconte, pas simplement pour moi, mais pour la personne en question. Je me suis documentée, j’ai lu tout ce qui concernait l’affaire un maximum. J’ai aussi lu les lettres qu’Agnès avait écrites pour avoir une idée de qui elle était." Et d'ajouter : "Après, ça reste de la fiction. Il y a un saut à faire car je sais que de toute façon ça ne sera pas vraiment Agnès. C’est une proposition de fiction autour du personnage d’Agnès Le Roux. Donc j’ai changé un peu ma façon de préparer le rôle, et comme c’était André Téchiné, j’ai fait un maximum de choses avant, histoire d’arriver un peu préparée sur le tournage."