Choqué par cette œuvre au final et, en même temps, subjugué par son efficacité. Toutes âmes sensibles s'abstenir! On ne vous aura pas prévenus (aucun avertissement officiel à ce titre...) Ce film serait resté excellent s'il n'avait pas été doté
d'une issue aussi atroce, qui fait songer à du Haneke. Voilà un supplice, un sadisme qu'on n'attend pas et qu'on nous inflige froidement. Horrible, voilà le mot qui vient d'emblée à l'esprit en fin de visionnage de ce film générateur d'écœurement. Je me suis même senti mal
. Si vous vous attendez à un Brokeback Mountain version lesbienne, vous allez être déçus.
Ici c'est pire -le romantisme tombe à plat- et, surtout,
c'est l'idée de laideur qui, globalement, l'emporte (déjà qu'on a pas mal d'éléments caractéristiques du film d'horreur en cambrousse). Mais pourquoi ne pas alors avoir carrément fait un film plus stylé? Dès le début, improbable, on se demande vraiment où on va, dans ce trou paumé entouré de forêt où trois jeunes se morfondent et où légumise un vieux grabataire. On ne pourra crier à l'excellence au vu de quelques grossièretés scénaristiques qui portent atteinte à l'intelligence qu'on se faisait des personnages, tant Vic que Flo.
Comment peut-on, dans une situation pareille, refuser ou mépriser l'assistance d'un encadrement judiciaire? Comment peut-on s'affranchir d'informer la police après avoir été victime d'un acte de cruauté semblable?
Niveau jeu, ça reste épatant, troublant même. Je pense surtout à Pierrette Robitaille, qui incarne une Vic presque parfaite (une vraie révélation), peu méfiante. Romane, en ex-taularde bisexuelle contrariée, est un peu en-dessous, pas toujours au diapason (déjà qu'elle se trouve être la seule non dotée de c'Christ d'accent québécois) mais tout à fait dans son personnage, d'une force libre rarement vue depuis Les Nuits fauves. Marc-André Grondin (un officier de probation gay, bouc et crâne crasé), au jeu moyennement convainquant, manque un peu de véracité d'expression mais sied au rôle, d'ailleurs pas terrible justement. Ça cherche à se rattraper sur la fin (de manière assez ridicule) mais ça ne suffit pas: on pourra toujours trouver le tableau lesbophobe. Même le titre exprime un goût douteux, dont on ne saisis le sens caché que sur le tard et avec quel effroi! Après L'Inconnu du Lac (dont la beauté romantique n'a point d'équivalent ici), décidément, on nous inflige bien des désespoirs. Non, ce n'est pas une romance, non, ce n'est pas vraiment drôle... C'est un film-malaise (efficace pour se sentir mal ou coupé du monde). N'allez donc vous perdre en ces bois que si vous savez à quoi vous en tenir.