Le genre typique de films dont on se demande pourquoi ils existent en fait. Peut-être pour donner une plus grande audience à une pièce de théâtre, mais visiblement vu le peu de critiques du film sur allocine ça n’a pas trop fonctionné.
En fait on assiste à quoi : des acteurs discutent de la crise dans une usine désaffectée. Oui, le film est tourné dans une usine, laquelle est censée être une allégorie (enfin j’espère, car c’est peut-être juste par manque de moyens) de la société qui s’écroule. Sur la forme de toute façon il n’y a rien à relever. Décors d’usine, photographie totalement neutre, documentaire, mise en scène minimaliste qui nous offre une pièce de théâtre sans chercher aucun artifice cinématographique (on en est même au monologue face caméra !), et bande son ultra-restreinte. Le Grand Retournement c’est du théâtre filmé pur et dur, et qui n’a pas du tout le charme du théâtre, le vrai. La seule différence fondamentale c’est le cadre, et avouez-le, entre les ors d’une salle et le béton nu des murs d’une usine, on est perdant.
Le casting est bon, certes, et c’est véritablement le seul intérêt de ce film. Encore qu’ils soient plus comédiens qu’acteurs ici, mais la manière dont ils déclament les alexandrins, le plaisir ludique qu’ils prennent à camper ces personnages et leur capacité à introduire de l’humour avec peu permet de rendre le film supportable. Et puis Jacques Weber, François Morel, même Edouard Baer, même si on n’est pas fan, c’est tout de même du très bon. Reste que pour moi la découverte de ce film c’est Jean-Damien Barbin, vraiment excellent, très charismatique et doté d’une voie très particulière qui rend tout de suite différent. Il a un côté un peu envoutant, bienvenu dans un film qui n’a pas grand-chose d’autres pour envouter.
Ces acteurs doivent donc déclamer des alexandrins, car oui ce film est tout en alexandrins. Un choix étrange, que je respecte mais qui me semble assez inutile et alourdi un film déjà bien lourd. En vérité, je pense savoir pourquoi des vers, parce que sur le fond le propos est bien creux. C’est foutraque, au moins autant que les explications que semblent vouloir donner les banquiers au président à un moment donné. Le film fait du surplace plus d’une fois, se répète, et ça tourne vite en rond. Je rejoins certains avis qui disent que ce métrage aurait gagné à être plus un moyen métrage qu’un long. Un long qui ne s’assume d’ailleurs pas pleinement vu qu’il dure 1 heure 18. Le bavardage continuel avec un nombre pléthorique de personnage finit par altérer la clarté et l’efficacité du propos. Il résulte quelques scènes drôles et une actualité qui suscite parfois l’attention, mais ça reste démonstratif et peu didactique à la fois.
En somme, Le Grand Retournement est un film pompeux sur la crise bancaire. C’est du cinéma auteurisant dans le sens mauvais du terme. C’est du cinéma qui ne l’est pas, qui peut-être fait des miracles sur les planches, mais qui ne réussit absolument pas sa transition cinématographique. 1.5 pour les acteurs, quelques belles phrases et quelques scènes drôles, mais subjectivement pour moi ce n’est pas du cinéma et c’est proche du 0.5