Le metteur en scène Germinal Alvarez s'est souvent demandé comment cela se passerait si l'on était projeté dans son propre passé. L'idée de revivre les évènements n'a cessé d'évoluer dans sa tête : "Je me suis imaginé en août 2001 à New York, avec la conscience des événements à venir : comment sauver les futures victimes du 11 septembre ? Tenter de prévenir et convaincre les autorités, en étant le plus précis possible sur la date, l'heure des impacts, le nombre de morts ? Bien sûr on ne m'aurait pas cru ! Puis quand les événements se seraient produits en tout point conformes à mon témoignage, je serais devenu le principal suspect". A partir de là, il tenait le concept de son thriller fantastique.
L'Autre vie de Richard Kemp est le premier film de Germinal Alvarez. Auparavant, il a mis en scène plusieurs courts métrages, comme "Jour Blanc", et réalisé un documentaire pour la télévision, "Eva, la robe de grenade". Il a également participé à la réalisation en 2007 de la série d'animation Skyland diffusée sur France 2.
Germinal Alvarez n'a pas souhaité prendre une ville reconnaissable à l'écran. Il s'est alors directement inspiré des mégalopoles japonaises et notamment de celle d'Osaka, pour laquelle il voue une véritable admiration : "Le scénario exigeait une ville portuaire et j’avais par ailleurs en tête une certaine modernité architecturale, liée aux années 80". Comme il n'existe pas d'équivalence en France, le film a été tourné à différents endroits. Le quartier Mériadeck à Bordeaux est ainsi devenu une ville. Mais comme l'histoire est censée se dérouler en bord de mer, la base sous-marine de La Pallice, près de La Rochelle et le pont de l'Ile de Ré se sont alors ajoutés aux décors, pour donner l'impression d'un seul et même ensemble.
L'Autre vie de Richard Kemp se déroule à trois époques différentes. En 2010, en 1989 puis de nouveau en 2010 après que le personnage de Jean-Hugues Anglade ait modifié son passé. Trois époques, trois lumières différentes ; une pour chaque ambiance : "Au début, en 2010, la dominante bleuvert reflète à la fois l’état mental de Richard et la froideur technologique du monde d’aujourd’hui. En 1989, l’image devient beaucoup plus jaune et sale, elle suggère la moiteur de l’été et la suffocation du vieux Kemp projeté dans son passé. Enfin la palette des dernières scènes est en demi-teinte, beaucoup moins contrastée, à l’image de la sérénité de ses personnages", explique Germinal Alvarez.
Jean-Hugues Anglade interprète le personnage de Richard Kemp en 2010 comme en 1989. Une performance qui correspond à ce que souhaitait le réalisateur. "J’avais en tête, dès la conception du projet, que le même acteur jouerait les deux Kemp avec vingt ans d’écart", explique Germinal Alvarez. La magie du maquillage a fait le reste.
Pour son premier long métrage, Germinal Alvarez a dirigé l'actrice Mélanie Thierry, qui a obtenu le César du Meilleur Espoir Féminin en 2010 pour sa prestation dans Le Dernier pour la route où elle donnait la réplique à François Cluzet. Dans L'Autre vie de Richard Kemp, elle compose un duo avec un autre grand acteur français, Jean-Hugues Anglade.
Le nom du personnage de Jean-Hugues Anglade fait directement référence à une personne qui a marqué la jeunesse du réalisteur : "Le nom du personnage principal vient de mon enfance, du chorégraphe anglais Lindsay Kemp, que mon père accompagnait régulièrement au Japon". Le père de Germinal Alvarez était producteur de danse contemporaine, souvent en déplacement, d'où l'admiration du futur cinéaste pour le pays du soleil levant. Autre raison : "J’ai par ailleurs une fascination pour la lettre K, le K de Kubrick, Kusturica, Kurosawa, le K de mes premiers courts métrages « Le silence des K » et « Mékanique »", ajoute Alvarez.