Sean Ellis dresse un tableau pessimiste du tiers monde en propulsant une famille paysanne philippines dans les méandres de la capitale, Manille. Forcés de quitter leurs rizières par manque de moyens conséquent, un père, une mère et leurs deux enfants en bas âge partent tenter leurs chance en ville, métropole tentaculaire dénommée Metro Manila, mégalopole asiatique qui souffrent, comme bien d’autres, d’un taux de criminalité pour le moins élevé et d’une ségrégation entre les classes sociales. Le réalisateur ne s’attarde pas sur la vie rurale de ses personnages, les propulsant très rapidement dans la chaos urbain, faisant d’eux très rapidement la cible d’arnaque au logement, les faisant parcourir les bas-fonds de Manille pour aboutir dans un bidonville crasseux. Très vite, là aussi, le père et la mère trouvent des emplois, lui un métier pour le moins dangereux, elle un métier dégradant.
La misère est sans cesse présente dans le quotidien des personnages d’Ellis, toujours sur la corde raide. Alors que l’on sent poindre la délivrance dès l’embauche du père dans une société de convois de fons, les choses basculeront à nouveau dans la noirceur lorsque le bonhomme sera confronté à la corruption, la criminalité. Notons que si Ellis privilégie la narration d’un polar d’avantage que d’un drame social, c’est ce deuxième aspect qui définis clairement le caractère de son film. Certes, la trame policière est soigneusement écrite, le final saisissant, mais la véritable force de Metro Manila est bel et bien son portrait incisif de la société Philippine, pauvre, désavouée et en perpétuelle recherches de jours meilleurs. L’arrivée en ville de la famille paysanne est véritablement le moment fort du film d’Ellis, dans le vacarme de la circulation, des cris. La surpopulation d’une métropole telle que Manille, il pourrait s’agir d’autres villes, n’aura que rarement été aussi palpable au cinéma.
Coté scénario, comme mentionné plus haut, l’intrigue tient très bien la route. Un léger manque de rythme plombant un tantinet l’ouvrage, tout comme quelques séquences quelque peu en déca de la moyenne, ne ternissent finalement que peu l’ouvrage, sensiblement humain, saupoudré d’une once de critique social. La misère est en somme la même partout, des bidonvilles d’une métropole asiatique aux Barrios des grandes villes sud-américaines. Notons au passage que Metro Manila est une excellente vitrine à la contemplation des restes de la colonisation espagnole de ces îles asiatiques, dont la culture populaire, le jargon et les noms, renvoient directement à la vie rurale et métropolitaine, là encore, d’Amérique du Sud. Les images de Sean Ellis vont dans le sens du dépaysement hardcore, ne montrant pas le tourisme, les atouts des Philippines mais bel et bien ses revers, sa dure condition social et politique.
Les acteurs, quant à eux, sont pour la plupart excellent. L’on soulignera finalement qui si Ellis met l’accent sur la mari, la femme, elle, n’est pourtant pas oubliée. L’on aurait certes aimé en voir plus du coté de l’emploi de madame, dégradant et hautement important dans la compréhension des obligations qu’ont des parents pauvres envers leurs enfants. Le sacrifice d’un parent sera finalement synonyme de délivrance, aucun autre choix ne s’imposant à l’un d’entre eux pour offrir une vie meilleure à leur descendance. Symbolique du tiers monde mais toujours efficace à l’écran, cette apitoiement s’avère être douloureux mais pourtant le seul angle d’attaque pour peindre un tel portrait. Y amener gaité et morale suave équivaudrait à de l’hypocrisie. Au final, le travail de Sean Ellis est remarquable, et ce même si le réalisateur manque d’ampleur dans sa démarche, presque trop timide. Bravo, en tous les cas. 15/20