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Un visiteur
2,0
Publiée le 30 mai 2013
Une base intrigante mais ensuite c'est long, long, long... C'était peut-être bien pour la TV japonaise, à laquelle ce projet était destiné, mais il aurait fallu une version remontée pour le ciné pour ne pas qu'on ait ce sentiment de s'engluer...
Un film qui traine en longueur, nous fait miroiter.. Parfois glauque et derangeant, l'intrigue survole cependant les 2 premières histoires et nous laisse sur notre faim. Il y a ici beaucoup de marques de la societé japonaise, et ce film attise la curiosité. Vivement le second volet !
La diffusion sur grand écran de la mini-série réalisée par Kiyoshi Kurosawa d’après un roman célèbre au Japon est passée par une scission en deux films, chacun suivant deux histoires parallèles basées sur le tronc commun du traumatisme vécu dans leur enfance par quatre fillettes. L’évolution psychologique des deux premières héroïnes quinze ans après l’incident que l’on suit dans cette première partie sont radicalement opposées, l’une étant devenue une femme au foyer soumise en proie à des hallucinations et incapable d’avoir un enfant tandis que la seconde est devenue une institutrice qui soigne son remord dans sa relation avec les enfants. Si on retrouve dans ces deux premiers segments l’imagerie épurée à laquelle nous a habitué la photographie très clinique des précédents films du réalisateur, le traitement tout à fait différent de ces destins de femmes est une preuve d’audace remarquable. Les hallucinations de Sae sont source d’une imagerie fantastique glaçante alors que les relations conflictuelles qu’entretient Maki avec ses collègues peuvent être interprétées comme une satire sociale virulente. Inégal dans sa structure formelle mais cohérent dans son message d’espoir, le peu de rythme qui anime ce film choral poignant est, du fait de sa durée, un frein regrettable à l’implication du spectateur. Peut-être aurait-il mieux fallut nous l’exporter sous son format initial.
Voila un film haut en couleur sur le japon.....Il semble peindre une réalité irrévocable sur les mentalités japonaises... Peinture sociale et fantastique, le film est divisé en deux grandes parties qui nous tracent les séquelles de deux petites filles devenues femmes (15 ans après), après que quatre d'entre elles aient assisté à un meurtre dans leur école...... Le premier portrait lorgne vers le fantastique, avec une histoire d'amour mêlant fantasmes et incongruité (l'introspection des deux personnages est exemplaire et envoutante)....La petite fille y ressemble à une poupée.... Le deuxième portrait, beaucoup plus social et concret, nous présente une professeur dans ses réunions de parents, où les accusations pleuvent à tout va....Le tableau de la société nippone est très précis et pernicieux, il ne peut laisser insensible ni un parent d'élève, ni un professeur.... Le style de la caméra mélange esthétisme et dépouillement et accrédite le discours du réalisateur par une sorte de virtuosité poétique et colorée... La musique n'est pas en reste et est parfois troublante.... Un film résolument moderne (contemporain) dans son fond et sa forme, et qui laisse une trace dans la mémoire du spectateur....J'ai beaucoup aimé...
Le documentariste français Oliver Meyrou ironisait sur la place de la télévision dans l’art en disant « Le cinéma est un art, la télévision est un meuble ». Il met alors en place une frontière nette entre les deux supports oubliant les passerelles qui les lient : les Séries. Les réalisateurs sont de plus en plus nombreux à tenter l’aventure télévisuelle comme Scorsese (Broadwalk Empire), Assayas (Carlos) ou plus récemment Campion (Top of the Lake). La qualité de l’offre télévisuelle permet même aux réalisateurs d’obtenir des sélections dans les Festivals : Carlos à Cannes, Top of the Lake à Sundance, Berlin et Cannes ainsi que Venise et Deauville pour Shokuzai de Kyoshi Kurosawa. Œuvre de plus de 4h30 transformer en France en un dytique savamment coupé (celles voulaient se souvenir/celle qui voulaient oublier), Shokuzai est avant tout une série en 5 épisodes réalisée pour la chaîne nippone WOWOW. Le passage par le petit écran permet de dilater le temps et ainsi de construire une narration fine sans se poser forcément la question de la nécessité. Il n’y a plus de question de coût/gain de l’image. Jamais Kyoshi Kurosawa n’aurait pu livrer une si grande fresque sur la culpabilité et la rédemption sans utiliser les codes de la série. Il dit d’ailleurs que c’est avec Shokuzai qu’il saisit « ce qu’est la tragédie pour la première fois ».
L’œuvre de Kurosawa naît de l’envie de narrer les changements perceptibles dû à un traumatisme. L’auteur est travaillé par la question du vide ; dans Shokuzai c’est le vide de la vie dont le souffle s’échappe dans l’horreur. L’horreur est le viol et le meurtre d’Emili par un homme dont l’identification est impossible par le blocage mémoriel des 4 fillettes qui l’ont vu. L’intrigue glisse alors dans la culpabilité et la quête de rédemption suite à la promesse macabre d’une mère vengeresse, Asako. Elle représente le fantôme du passé attendant même Sae, dans le premier épisode, sous un pont à la manière des esprits dans la tradition japonaise. Kurosawa met alors en image les séquelles du passé qui forment le présent.
Chacune est une facette de la réaction à l’horreur, à cette incursion soudaine dans le monde dur des adultes mais surtout au monde sexué de la gente masculine. Sae (1er Episode) a ainsi développé une peur panique du contact et a mentalement bloqué son corps dans l’enfance s’interdisant la fertilité. Elle se déshumanise sous les traits d’une poupée fantasmée par son mari. Cette stagnation de l’enfance se retrouve avec Akiko (3e Episode) mais Kurosawa la pousse à l’extrême (voire au fantastique) avec cette « femme-ourse », sorte d’adolescente éternelle au comportement animal. Elle s’exclue de la communauté des hommes qu’elle ne retrouvera seulement pour revivre une enfance à travers la fille de la copine de son frère. Pour Maki (2e Episode), c’est dans la rigueur d’un cadre scolaire qu’elle tente d’inculquer les valeurs qui auraient sans doute pu empêcher le drame. Elle se protège par des cours de Kendo qu’elle mettra en pratique lors d’une scène mémorable d’attaque dans une piscine devant ainsi l’héroïne qu’elle n’a pas pu être. C’est comme ça qu’elle paye sa dette. Enfin, Mayu (4e Episode) se détache un peu des 3 autres protagonistes. Elle est sans doute celle à qui le sous-titre celles qui oublient va le mieux. Cependant son comportement de fille volage repose belle et bien sur la perte d’opinion du corps et des atouts féminins.
Cette dénaturation de l’homme est aussi visuelle. Si le film s’ouvre sur les couleurs douces et colorés de la campagne japonaise dans laquelle les robes des fillettes sont comme des coups de pinceaux. De l’après-midi ensoleillé, le film bascule soudainement dans la nuit noire symbolisant le voile épais de l’horreur qui s’abat sur le film dont seule la lumière rouge des voitures de police amène la lueur macabre. Le rouge chez Kurosawa est la couleur de l’au-delà, c’est ainsi le fantôme d’Emili qui couvre les visages et les culpabilisent. Puis, la photographie bascule dans des couleurs pastelles et dénaturés symbolisant le voile de l’évènement sur les vies brisées que Kurosawa dépeint.
Shokuzai est également un regard sur la société japonaise. Une société profondément atomisée qui met en exergue la solitude des Hommes. Le vide se comble par le biais de réseaux de connaissances, mais jamais par le hasard des rencontres. Ce vide moral trouve écho dans l’image de dépeuplement qui se dégage des lieux : maisons abandonnées, gymnases vides. De plus, se dégage de l’œuvre de Kurosawa un certain machisme social avec des mariages arrangés, des femmes-objets. Les hommes sont réduits à des archétypes qui regroupent les malversations souvent attribuées au sexe masculin. Cependant la rédemption de l’homme est progressive : d’abord par l’ambiguïté du frère d’Akiko (3e Episode). Le rôle du père d’Emili pourtant malsain parvient à dégager une certaine pitié bienveillante excusant presque son geste.
Shokuzai est une fresque psychologique intéressante, mais elle repose néanmoins sur une longueur et sur une exagération des situations qui perd parfois le spectateur. Kyoshi Kurosawa montre son talent de réalisateur mais s’autorise parfois des envolés très « télévisuelles ». Shokuzai fascine tout de même dans ses incursions au bord de l’irréel.
Kurosawa revient sur le devant de la scène après quelques années d'absence en adaptant la bande-dessinée Shokuzai. C'est avec un grand plaisir que nous retrouvons ce réalisateur plein de talent face à une oeuvre aussi réussie. En effet chaque aspect est maîtrisé avec une main de maître, certes le film est parfois un peu lent mais malgré tout on ne s'ennuie jamais car l'histoire est très prenante. En effet, suivre le quotidien de ces quatre jeunes filles après un événement aussi horrible est sans aucun doute une expérience cinématographique marquante. Ce premier chapitre ne nous permet de voir le futur de seulement deux jeunes filles mais c'est avec une petite frustration que l'on quitte la salle sans connaître l'assassin. Néanmoins, on oublie très vite ce sentiment en repensant à la splendide mise en scène. On se souvient aussi des excellentes prestations de toutes les comédiennes adultes comme enfants. La musique nous plonge aussi dans l'esprit de ces filles rongées par les souvenirs. On peut donc dire que c'est avec un grand plaisir que l'on quitte ce premier opus mais c'est surtout avec beaucoup d'envie que l'on attend le second.
A nouveau, Kiyoshi Kurosawa sort du fantastique pour nous offrir cette fable contemporaine d'une profonde noirceur. Mais ce qui ne déroge pas à la règle de sa filmo, c'est son regard toujours aussi acéré, pessimiste et intelligent sur la société japonaise. C'est aussi et surtout un film sur l'engagement, sur les démons qui tenaillent chacun de nous, qui nous façonnent et dictent nos actes, c'est un film au climat malsain où la tension est permanente. Du très bon Kurosawa donc même si ce premier volet traîne parfois en longueur et frôlerait presque par moments la caricature.