La première fois que j’ai vu « Fight Club », je me souviens de n’avoir vraiment pas aimé le film… Il faut dire que ce dernier a, depuis sa sortie, suscité les réactions les plus extrêmes, certains le critiquant virulemment et d’autres l’adulant, le faisant très vite devenir culte. Ce film a tellement marqué la pop culture qu’il n’a jamais vraiment quitté mon esprit, et le fait de soumettre souvent mon point de vue à celui d’amis ayant beaucoup aimé le film, a fait que j’ai toujours eu pour curiosité de le revoir, afin peut-être de le réestimer ou au contraire de rester sur mes positions… Après l’avoir revu, je peux donc dire que je suis partagé : il faut l’admettre, « Fight Club » est une vraie claque : rythme à 200 à l’heure, voix-off et dialogues d’un cynisme jubilatoire, propos à contre-courant des normes hollywoodiennes, … Oui, le film a tout pour fasciner le spectateur et le coller à son siège dès les premières minutes. L’histoire, c’est celle du Narrateur (Edward Norton), un trentenaire paumé, produit total de la société de consommation, qui rencontre Tyler Durden (Brad Pitt), un anarchiste charismatique, avec qui il va fonder un club de combat clandestin, qui très vite va prendre de l’ampleur et se transformer en organisation secrète, … Le principal choc de « Fight Club » vient du jusqu’au boutisme de sa démarche. Le film nous fait rentrer dans la tête de ses deux personnages et nous fait suivre leur évolution en permanence, sans aucun recul, sans aucun jugement sur leurs actes. Là où au début, le film est plutôt comique et nous montre le Narrateur et Tyler ne se reconnaissant pas dans le consumérisme de l’époque, et décidant de mener leurs petits actions de rebellions, au cours de scènes hilarantes (la projection de cinéma, le job de serveur dans un restaurant, …), on suit les personnages sombrer rapidement dans l’autodestruction, notamment au cours des fameux combats, symbolisant la volonté d’exhorter les frustrations des rapports sociaux, et de revenir à une virilité primitive. Ces combats, d’une violence extrême et choquante, parce que gratuite, ne sont que le premier échelon d’une frustration qui les fera basculer vers l’anarchisme, jusqu’au terrorisme. Le récit est donc particulièrement glaçant et, bien que l’histoire soit intéressante, on est vite épuisé et horrifié face aux horreurs que commettent les personnages. C’est donc pour moi à la fois le point fort et le point faible du film, une narration fascinante mais qui en même temps ne cesse de nous révulser face à la violence du propos et de l’action. Je pense que c’est d’ailleurs l’objectif du film, ce qui est louable, de nous montrer la vie de ces personnages, dans leur intériorité, quitte à choquer, sans jamais apporter un point de vue extérieur, qui viendrait contrebalancer cette violence. Malgré cela, on est tout de même intrigué par la complaisance avec laquelle David Fincher filme Tyler Durden, comme-ci ce dernier prenait plus ou moins parti pour le personnage… L’autre grande faiblesse du film réside d’ailleurs dans la mise en scène selon moi : Fincher copie, sans jamais égaler, les styles de Bryan Singer et de Danny Boyle, auxquels il ajoute des effets de style pompiers et datés typiques des années 2000. Ajoutez à cela une photographie sépia ratée et des situations parfois franchement absurdes (
Se battre contre soi-même ? Sérieusement ? Vous avez déjà essayé ?
), et je ne parle même pas du twist final, totalement incohérent face au reste de l’histoire… Vous comprendrez donc que le film comporte selon moi beaucoup de défauts qui ne lui permette pas de rentrer dans mon panthéon personnel. Malgré tout, le film a aussi de grandes qualités, une histoire fascinante, comme je l’ai souligné précédemment, des acteurs géniaux (Edward Norton, Brad Pitt, Helena Bonham Carter) ainsi qu’une audace, une originalité et des fulgurances (magnifique scène finale, sur la musique des Pixies) qui en font une œuvre majeure des années 90. Alors, « Fight Club », un chef d’œuvre ? Assurément non, selon moi, mais un film choc à coup sûr, que je conseillerai à tout le monde de voir au moins une fois dans sa vie, public averti bien sûr…