Ce qui est si touchant dans Fight Club c'est cette partie si fébrile du personnage, cette paroi si fine, ce rapprochement si fort qu'on entretient avec lui, cette fragilité constante. On a affaire à un personnage qui se bat contre lui même, qui peut à tout moment s'effondrer, disjoncter, et c'est donc à la fois follement fascinant mais aussi très émouvant, et plus le film défile, plus on se perd avec lui, plus on se laisse aller dans le monde de notre introspection, prêt à se lacher totalement dans la folie pour espérer quelque chose comme l'amour pourquoi pas ? Parce qu'au fond, la force de Fight Club, ce n'est pas le coup de poing, mais le coup de coeur...
Ce qui est génial dans le film, c'est qu'il relate sans cesse la perdition du personnage et cela est caractérisé par la représentation de la solitude du personnage. On le sent, sans cesse, perdu, s'affrontant soi, ne sachant plus où aller, changeant sans cesse direction, se contredisant.
Le film a un vrai propos, et il y tient énormement pour lui d'en parler, et ca : mince on le ressent !
La force de Fight Club c'est ca : avoir réussi à développer un propos totalement à travers son personnage et la mise en scène par les métaphore affluentes du film. Ce propos, c'est un personnage qui perd ses repères dans la civilisation moderne, et qui voit naître et faire surface, un conflit interne, longtemps plongé aux oubliettes. Il va donc tenter de s'assumer, d'être heureux, et de ne pas laisser quelqu'un d'autre prendre la responsabilité de son existence. Le film arrive donc à développer son propos en développant le personnage (autrement dit l'idéal pour un film à savoir tout développer de manière à ce que cela semble naturel).
Le film est superbe parce qu'il exprime parfaitement le tiraillement du personnage, les épreuves qu'il subit dues à son conflit interne le mène sans cesse à une évolution, tout en développant la philosophie du film. Tout son conflit interne, et les conséquences qui en découle du début à la fin, exprime à la fois la philosophie du film et par la même occasion, la psychologie du personnage. C'est avoir confondu les deux qui relève du génie. Parce que c'est la preuve d'un film naturel, développé, artistique, et non faussement crée, artificiel...
Toutes les épreuves que subit le personnages par lui, exprime qui il est, ses erreurs passées et son évolution, le fait aussi qu'il soit perdu, et ca c'est incroyablement touchant. Il est juste follement malheureux, et il cherche une solution, comme tout le monde.
Les acteurs sont grandioses. C'est hyper rythmé, la chronologie est parfaite quant à l'évolution du personnage durant le film, et l'évolution de la philosophie, du propos.
Le film se contredit sans cesse parce que le personnage se contredit sans cesse, et cela est très Nietzschéen : l'ambiguité, ici dans le film c'est caractérisé par la destruction et la reconstruction, et c'est pour cela que le film est très nuancé et qu'il y a eu des débats du genre : facho/pas facho, consommation/capitalisme. C'est à cause de ces nuances que Fight Club a été si difficile à comprendre, parce que si on prend ses idées au pied de la lettre, on se trompe. La seule idée à prendre au pied de la lettre est la fin : s'assumer, et rebatir sur l'amour.
Car le film est moins porté sur la violence ou la critique de la civilisation moderne que sur le tiraillement de son personnage à l'interieur de celle ci, et donc la civilisation provoque un reflux de ses problèmes à la surface, mais elle n'est pas tant cause de ses problèmes (de son conflit interne) que du déclencheur de son pétage de plomb.
Et cette idée de reconstruction et destruction est représenté durant tout le film par ses contradictions avec lui même. Il trouve la solution lorsequ'il s'assume soi, notamment son amour pour Marla. C'est au moment où il prend ses responsabilité qu'il tue Tyler Durden.
L'amour, résultat d'une destruction nécessitant des épreuves douloureuses, est la solution.
La violence est donc moins une réalité déclamée plutôt qu'une représentation du chaos, du désordre et de la destruction que le réalisateur cherche à promouvoir (parmi d'autres, même si ici elle est absolument excellente et necessaire car en rapport avec le propos et le reste du film, notamment sur la civilisation moderne, la douleur et l'émasculation).
Tel l'amour que Fincher a investi pour son film, il nous propose d'en faire autant dans nos vies...