Il est rare de voir la carrière d'un cinéaste avancer à reculons. C'est le cas de Matt Reeves. Qui à chaque film a gagné en notoriété pour le grand public, mais a perdu en qualité artistique pour les cinéphiles éclairés. D'abord il commence avec "Cloverfield", un véritable chef-d'œuvre aux apparences de film de série B (une lecture de notre critique sur ce film ferait plaisir). Quelques années après, Reeves nous assène un deuxième "Planète Des Singes", bien moins réussi encore que son précédent, pour en arriver à ce "The Batman" assommant, vaniteux, et ostentatoire. Assommant par sa longueur dûe au grand nombre de scènes étirées sans raison. Vaniteux dans son titre. "The" sous entendant que cette version fera date dans l'histoire, et qu'elle est la meilleure. Ostentatoire, dans le traitement de l'atmosphère "Film Noir" que Reeves distille dans son univers de super héros. Ce choix du cinéaste était judicieux, dans la mesure où Bob Kane créé son Batman à peu près à la même période où Hammet, Chandler, et consor, publient leurs romans, ceux-là même, qui donneront les classiques du "Film Noir", tels que "Le Faucon Maltais", ou "Quand La Ville Dort". Sauf que Reeves, utilise l'atmosphère du "Film Noir" en négligeant l'essentiel du film noir. Son scénario, certes, complexe mais surtout compréhensible, et crédible. Or il est difficile de percevoir de la crédibilité dans cet alambiqué concept d'un Gotham Renewal Fund alimentant, à la fois, la pègre locale, et permettant en même temps, de corrompre tous les notables de Gotham. Où peut-on voir non plus du crédible, dans un scénario avec autant de scènes franchissant des pics d'invraisemblance, notamment celle où Batman se jette dans l'eau un câble électrique à la main. Ce manque de crédibilité du scénario, tient aussi à son côté " gruyère". Des flous partout !!! On quitte "The Batman" avec un nombre incalculable de questions sur l'intrigue, entre mille, pourquoi l'aspect clonique du "Villain"? Quelle "faute" Wayne père a-t-il commise concernant l'orphelinat? L'ostentatoire de Reeves se voit aussi dans sa répétition inlassable des prises de vue mettant en valeur les ombres et lumières. Sauf que là encore, l'Américain oublie l'essentiel. Ce jeu d'ombres et de lumière propre au film noir, ne devait pas empêcher le spectateur de distinguer les choses. Or il faut bien l'avouer, durant les scènes d'action, qu'il s'agisse de bastons, ou d'investigations, on n'y voit que pouic !!! Ostentatoire est aussi la musique, sirupeuse à souhait, ne lésinant jamais sur les violons larmoyants dans les scène de Pathos, ou de séduction telles que celles entre "The Bat" et "The Cat". Pour ce qui est des acteurs, si Kravitz, Wright, et Turturo, parviennent à tirer leur épingle du jeu, les autres grosses pointures font pâle figure. Les gros plans portrait interminables, et à répétition de Pattison, en plus d'être lassants, ils ne le poussent guère à la performance. Ni le maquillage, ni le jeu de Farrell ne crève l'écran, quant à Sarsgaard, on l'a déjà vu plus flamboyant. En fait, l'aspect plutôt mièvre de la performance d'acteurs vient surtout des dialogues qui sont d'une banalité navrante. Que tant de critiques et de spectateurs crient au génie pour ce Batman, relève d'un cas rarissime de cécité volontaire, sévère, sinon totale.