Venu de nul part, le dernier film du poétique Brisseau est son plus intime, son plus doux aussi, son plus pudique, son plus magique. Avec une économie de moyen (une RELLE économie qui n'a pas été choisie), tourné avec Brisseau acteur, dans son appartement de Paris, avec deux trois comédiens de plus (dont la géniale Virginie Legeay) dans un intérieur cinéphilie et littéraire. Brisseau se met en scène, ancien professeur (avec une diction des plus terribles) et secours, protège une jeune fille qui devient peu à peu fantôme, mythe même de la femme disparue qui passe de foyers en foyers pour aider les personnes à achever leurs rêves. Le rêve de Michel c'est de finir son bouquin, là où le film devient un petit essai philosophique, reprenant avant tout la croyance, la religion, la mort. Et de croyance, le film de Brisseau en est rempli : niveau technique, c'est misérable par moment (mixage particulièrement et prise de son directe), image correcte, sans réel souci de lumières ou de couleurs pour les scènes principales. Là où le film prends tote sa force et son magique d'ofni, c'est lors des scènes de fantastique, lorsque les fantômes apparaissent, lorsque la jeune file endormie se fait capturer par un possible ange noir, et que la lumière est alors sublime, le film devient doux, rosé, bercé par du Malher et des travelings maîtrisés. Tous les moindres effets de scène prennent leurs sens et deviennent de vrais moments de cinéma, tellement le reste du film est comme bloqué par le réalisme de Brisseau (comme le faisait Choses secrètes, plus baroque par exemple) et on finit par avoir une réelle sympathie pour ce film qui rappelle autant le pouvoir des images, que la grandeur des histoires les plus simples, leur intimité tragique et drôle, et nous transmet un formidable sentiment de croyance dans tout ce que le cinéma peut offrir.