Merzak Allouache est un metteur en scène franco-algérien ayant notamment mis en scène les comédies Salut cousin ! et Chouchou avec Gad Elmaleh. Depuis quelques années, le cinéaste s'éloigne du registre comique pour un cinéma engagé socialement et politiquement. Ainsi, il a tourné Harragas en 2009, drame sur l'immigration et la jeunesse algérienne en rupture avec le système et continue donc dans cette voie avec Le Repenti, où il s'attaque à la guerre civile algérienne et l'islamisme.
Le Repenti revient sur un moment épineux de l'Histoire algérienne, la guerre civile qui a ensanglanté le pays entre 1988 et 1999 (la "décennie noire"). Le conflit a pris fin avec l'élection de l'actuel président algérien, Abdelaziz Bouteflika. Celui-ci a mis en œuvre l'adoption de la Loi sur la Concorde civile en 2000. Celle-ci permet à un islamiste repenti de rendre ses armes afin d'être réinséré dans la société et bénéficier d'une amnistie.
En raison du conflit armé ensanglantant l'Algérie, Merzak Allouache n'a pas pu rentrer dans son pays entre 1993 et 1999 : "Lorsque s’est profilée l’idée d’un arrêt de la violence qui ensanglantait le pays, j’étais très heureux. En 1999, lorsque je suis rentré, j’ai retrouvé un pays où régnait un optimisme étonnant et irréel (...). La presse nous apprenait que des contacts secrets entre l’armée et les islamistes qui se trouvaient dans les maquis allaient permettre très vite le retour de ceux-ci dans leurs foyers et l’arrêt des massacres, des embuscades, des attentats… Les Algériens découvraient un mot nouveau, «repenti» (ta’ib, en arabe), désignant ceux qui abandonnaient la lutte armée et se plaçaient sous l’autorité de l’Etat", confie le metteur en scène.
Le Repenti a été tourné dans la région de El Bayadh, à la limite du Sahara. Merzak Allouache a choisi cet endroit pour sa rudesse afin que celle-ci marque les images et les esprits.
Avec le personnage du Repenti, Merzak Allouache poursuit sa critique virulente de la société algérienne bridant la jeunesse et la laissant dans un total désarroi où censure et violence sociale s'entremêlent : "Ce jeune repenti est sûrement un monstre qui a peut-être tué, mutilé. Mais mon choix dès le départ était de le présenter non pas comme l’archétype du terroriste cliché, mais comme un être humain issu de cette génération sans espoir, sans éducation, prise souvent malgré elle dans le tourbillon de la tragédie qu’a vécu l’Algérie", explique le réalisateur.
Présenté à la Quinzaine des Réalisateurs de Cannes 2012, Le Repenti a glané le Label Cinéma Europa.
Nabil Asli campe Rachid, le djihadiste repenti ; le comédien tourne pour la deuxième fois sous la houette de Merzak Allouache après Normal ! en 2011. Adila Bendimerad (Djamila) avait aussi joué dans "Normal !" et retrouve également le cinéaste.
Le Repenti est sciemment oublié dans la presse algérienne, le scénario de Merzak Allouache ayant même été rejeté par la commission de lecture du Ministère de la Culture algérien : "J’ai l’impression d’avoir fait un film «honteux», mais cela renforce ma conviction qu’il fallait le tourner", confie le metteur en scène.
Merzak Allouache revendique un droit d'engagement en tant que cinéaste et le fait valoir avec ce film : "Le Repenti se veut une tentative de dialogue sociétal, mais malheureusement l’état du cinéma en Algérie, la disparition du public, l’absence de débat démocratique, l’état de déliquescence des associations, font que je n’aurai pas les riches débats que j’ai vécus autour de mes autres films. Alors parler d’un tabou, dénoncer des choix, raconter des souffrances, faire jouer à ce film son rôle, me semble pour l’instant utopique. Ce qui ne signifie pas qu’il faille baisser les bras", affirme-t-il.