A bien des égards, American Hustle (reconverti en Bluff pour les besoins de la VF) était le long-métrage immanquable de ce début d’année : un réal’ ayant déjà fait ses preuves avec la manière (Fighter, Happiness Therapy), un casting détonnant au quatuor principal aguichant (d’ailleurs issu de ses précédentes réalisations), et enfin une pléiade de nominations (entre autre) du côté des oscars pour parachever ce tableau pour le moins enjôleur. Bref, impossible de ne pas entretenir une énorme attente et beaucoup d’espoirs concernant ce dernier-né de David O. Russel, et que dire de la crainte d’un bide au regard de tant de mise en bouche ; mais, fort heureusement, là n’est le cas, si ce n’est que… un soupçon de déception plane. Aussi, et autant débuter par ce qui noirci un ensemble pourtant excellent : il advient que ce long-métrage est (trop) long, et arbore de ce fait un rythme des plus inégaux, parsemés de longueurs certes sympathiques en elles-mêmes mais desservant une intrigue de base mollassonne. Pourtant, le scénario était en lui-même très intéressant : basé sur des faits réels (l’affaire Abscam), et nous plongeant au cœur des années 70, l’occasion était alors d’assister aux machinations et arnaques en tous genres d’escrocs très attachants, alors contraints de collaborer avec le FBI. Et si cette même intrigue se veut plutôt étoffée, il advient qu’elle passe quelque peu au second plan, American Bluff faisant nettement la part belle à ses protagonistes ; pas un mal en soit, mais il subsiste de légers égarements allant de pair avec ces fameuses longueurs. Le film ne se veut donc pas forcément très captivant sur le plan purement scénaristique, encore que celui-ci nous gratifie de quelques rebondissements bienvenues, aussi c’est en se tournant du côté de la forme et de sa galerie de personnages qu’il parvient à séduire pleinement ; et en premier lieu, que dire de sa mise en scène, toute bonnement géniale ! Sur ce point la patte David O. Russel est ainsi des plus perceptibles, tandis que les costumes et autres décors assurent avec brio l’immersion au cœur de l’époque ; enfin, American Bluff arbore une BO savamment calibrée, parfaite en les circonstances et tout aussi appréciable ! Sur ce, reste à souligner la force majeure que sont les personnages de American Hustle, tant ces derniers sont jubilatoires ; naturellement, le renversant casting n’est pas étranger à cette réussite, et l’on ne peut alors que se prendre d’attachement pour les figures incarnées par les remarquables Christian Bale, Amy Adams et consorts. Même le nouveau-venu Jeremy Renner s’en sort admirablement bien, et tout ce beau monde va alors distiller avec parcimonie un humour des plus subtils, notamment le personnage Rosalyn Rosenfield, campée par la surprenante Jennifer Lawrence. Au final, American Bluff se veut à la croiser des genres, pas comique mais non dépourvu d’humour, il nous narre alors avec une certaine aisance les contours d’un scandale intéressant de prime abord, mais son parti pris pour le développement de ses personnages se fait au détriment de son intrigue ; un mal pour un bien, ou un potentiel gâché, à vous de voir, mais nul doute que l’on tient là un divertissement original d’excellente facture. Pas le meilleur David O. Russel (et je pense que beaucoup de nominations resteront sans récompenses) car pas toujours passionnant en somme, mais pourquoi s’en priver ?