Le film nous emporte dans le New Jersey, en 1978, où l'on retrouve Irving, un escroc vendeur de faux tableau et Sidney, sa maîtresse, obligés de travailler avec le FBI, représenté par l'agent DiMaso pour emprisonner des politiciens hauts placés.
American Bluff est tout d'abord un film policier dont le thème principal est la manipulation, et de côté-ci, O. Russel s'en sort avec brio. Le réalisateur manipule les spectateurs aussi bien que le font les personnages principaux, du fait de la révélation finale qui est savamment amenée. Et pourtant, malgré ce final éclatant, on sort de la salle avec un certain goût d'amertume.
En effet, bien que le film soit brillamment interprété par ses acteurs (Christian Bale, méconnaissable, et Bradley Cooper sont bluffants) on ne peut s'empêcher de voir les 2h16 s'écouler lentement. La division en deux parties du film casse son rythme. Les quarante premières minutes nous montrent une sorte de mélodrame à l'eau de rose, où les dialogues s'efforcent d'être drôles mais n'ont aucune répercussion, on n'arrive pas à s'émouvoir pour ces personnages qui ne semblent pas assez construits et qui manquent de profondeur. De plus, la réalisation morne de ce début de film n'aide pas, on a surtout droit à des plans fixes et des champs contre champ sur des dialogues interminables.
C'est à la fin de ses quarante minutes que l'on commence à se dire que le film peut enfin devenir intéressant, avec l'apparition d'une nouvelle intrigue plus dynamique à propos de politiciens corrompus liés à la mafia américaine. Mais une nouvelle fois American Bluff déçoit et ne se montre pas à la hauteur de nos espérances et s'engouffre dans une interminable monotonie. Beaucoup de pistes narratives amenées n'aboutissent pas et ne mènent à rien, à l'image de la famille de DiMaso qui est très brièvement présentée et que l'on ne revoit plus par la suite, ces pistes inabouties empêchent le film de progresser et soulignent sa lenteur. On sent bien que O. Russel a tenté d'insérer dans son film des effets comiques, autant au niveau des dialogues qu'au niveau du jeu d'acteur mais ce mélange de genres ne fonctionne pas et bien des gags tombent à plat. Le réalisateur échoue là où les frères Coen s'en sortent à la perfection, il n'est pas simple de traiter de sujets dramatiques et sérieux avec humour.
Au niveau de la réalisation, cette deuxième partie est certes dynamique mais ne brille pas par son originalité. O. Russel ne prend pas de risques et enchaîne les plans qu'il maîtrise, à l'image de ses travellings avant vers le visage des personnages, que l'on retrouve à de très nombreuses reprises.
Finalement, ce sont les dix dernières minutes qui étonnent. Le coup de bluff final est surprenant et satisfaisant, dans le sens où on aime se faire surprendre en même temps que les personnages du film. On est manipulé de la même façon qu'ils le sont, et ne pas avoir anticipé ce coup final nous réjouit. Cela n'est pas sans rappeler les faits actuels, où la presse manipule notre société en choisissant de traiter de certains sujets et pas d'autres, à la manière du réalisateur, qui, en prenant la décision de ne pas nous montrer la préparation du coup de bluff final réussit à nous manipuler. Mais ces dix minutes ne sont sûrement pas assez pour nous faire oublier l'ennui ressenti lors des deux heures précédentes.