Le Passé fait regretter les films qu’on adore ou qu’on déteste. Des avis extrêmes mais qui au moins ont le mérite de déclencher une réaction nette.
Le Passé, ici, n’est pas simple et empoisonne les relations d’une famille recomposée. Des non-dits, principalement, qui empêchent d’avancer. Il faut l’arrivée d’un ex-mari (l’excellent Ali Mosaffa. Belle barbe aussi) pour que petit à petit les langues se délient. L’arrivée d’Ahmad n’est au fond qu’un prétexte pour avoir un médiateur, car le personnage est bien réduit à ce rôle. Une fois que des voiles se sont levés, le personnage est doucement poussé vers la sortie par Asghar Farhadi. Dommage, moi je l’aimais bien.
En fait, c’est même le seul personnage pour lequel j’ai vraiment eu de la sympathie. Frustrant quand on sait que le film entier repose uniquement sur ses personnages, leurs relations, leurs non-dits, leurs frustrations et leurs sentiments. Sentiments bien refoulés, puisque le tout manque parfois d’émotion et pour certains de conviction.
Il faut reconnaître au Passé d’avoir un scénario qui prend le temps de dérouler l’intrigue et d’amener des révélations au compte-goutte. Et en 2h il y a le temps (bon j’ai regardé ma montre une fois, au bout d’1h30). Asghar Farhadi maîtrise son scénario et ça se sent. Au risque peut-être de parfois paraître trop maîtrisé. Le monsieur est taquin, et, comme pour Une séparation, prive le spectateur d’une fin nette laissant une situation mi-résolue, mi-à résoudre. Bon, moi j’aime ça, et puis ça colle bien avec cette ambiance de réalisme qui enveloppe tout le film.
L’autre point appréciable c’est la réalisation elle-même : des scènes longues, qui prennent le temps de faire ou dire les choses et qui ne vont pas nécessairement droit à l’essentiel. Pour équilibrer, on a "heureusement" des personnages parfois tête-à-claques (Marie est excédée, certes, mais ya-t-il vraiment besoin de gueuler sur monsieur son chéri parce qu’il ne trouve pas les clés ? C’est quand même pas sa faute d’abord) et compliqués. Je ne développe pas cet aspect, chacun se fait sa propre idée en fonction de l’écho que trouve l’histoire en chacun.
Au niveau de leurs interprètes, de la justesse. Toutefois, le couple Bérénice Béjo / Tahar Rahim m’a laissé indifférent, au point que n’importe quel (hypothétique ! :p) accident/rupture/etc. ne m’aurait pas spécialement dérangé. A titre personnel, toutes ces scènes à l’intérieur d’une voiture en train de rouler m’ont toujours fait craindre le pire. En même temps, avec cette caméria braquée sur le profil du conducteur ou du passager, je suis désolé, dans les séries TV c’est souvent annonciateur d’un accident imminent ! Allez je ne vais pas être de mauvaise foi, la relation Ahmad/Lucie (la fille à problèmes de Marie) fonctionne, elle, très bien. Le courant passe entre celle-ci et l’ex-beau-père et ça, ça fait plaisir.
Bref, un bon film tout de même et qui est surtout l’occasion de montrer qu’un film français d’Asgar Farhadi c’est bien aussi même si moi je préfère quand ça se passe en Iran.