Premier film vu en 2013 et premier coup de coeur!
Peut-être aurait-il fallu cependant imaginer un autre titre à ce film, ou lui adjoindre un sous-titre? Plutôt que de se contenter d'un banal "Renoir", on aurait pu donner comme titre "Le patron se meurt". Ce serait rendre hommage à Michel Bouquet, formidable interprète d'Auguste Renoir, comme il l'est, sur les planches, du roi Bérenger 1er, dans la fameuse pièce d'Eugène Ionesco, "Le roi se meurt". Car il y a des points communs entre ce film et l'oeuvre d'Ionesco. Auguste Renoir, que tout le monde appelle "patron", n'est plus qu'un vieillard perclus de rhumatisme lorsqu'éclate la guerre en 1914. Il mourra bientôt et il le sait, mais, comme au début de la pièce d'Ionesco, Renoir nie cette fatalité, et l'on fait tout, dans son entourage, pour la nier avec lui. Pourtant, elle est à l'oeuvre, dans le corps de Renoir qui a de plus en plus de mal à peindre, et sur les champs de bataille. Mais Auguste Renoir fait comme si rien n'avait changé. Son fils Jean, le futur grand cinéaste, revient blessé du front. Mais le peintre ne veut rien changer à son oeuvre, il ne veut peindre que des scènes heureuses car il ne faut pas ajouter du malheur à ce monde. Et ce bonheur éclate d'autant plus qu'il tombe sous le charme d'Andrée, une jeune fille qui se présente à lui pour être modèle et qu'il est ravi d'accepter et de peindre. Le bonheur, rien que le bonheur, dans ce petit paradis bien protégé qu'est le domaine des "Collettes". Pendant ce film, je songeais quelque peu à la belle exposition qui s'est tenu au Centre Pompidou de Metz l'été dernier et qui présentait des oeuvres, et en particulier des peintures, réalisées en 1917. En voyant cette expo, on pouvait, d'une certaine façon, diviser les artistes en deux camps: ceux qui avaient tenu à rendre compte, dans leurs oeuvres des horreurs de la guerre et ceux qui, comme Renoir, n'en tenaient aucun compte et peignaient comme ils avaient toujours peint. A la fin de ce film, lors d'une scène de repas champêtre, des soldats improvisent un chant, mais Auguste Renoir s'insurge: "Est-ce un repas de fête ou un repas funèbre?", demande-t-il. Ce qui importe, c'est de continuer à peindre jusqu'au bout et sans se laisser troubler par rien, même pas par la guerre!