Le duo Nicolas & Bruno (Nicolas Charlet et Bruno Lavaine), connu pour être les auteurs de l'émission de télévision humoristique « Message à caractère informatif » et pour avoir signé l'adaptation (scénario + dialogues) du roman de Frédéric Beigbeder « 99 francs », passe la seconde après avoir tourné leur premier long métrage, l'OVNI « La Personne aux deux personnes ».
Ils mettent aujourd'hui en scène « Le Grand Méchant Loup », adaptation moderne du conte des trois petits cochons et d'un film du même nom, réalisé en 2007 par le Québécois Patrick Huard (« Starbuck »). Produit par les frères Altmayer (toujours sur les bons coups ces deux là), « Le Grand Méchant Loup » met en vedette le trio d'acteurs Benoît Poelvoorde, Fred Testot et Kad Merad, ainsi que la pétillante Charlotte Lebon dans le rôle du fameux « grand méchant loup ».
Synopsis Allociné : Il était une fois trois frères qui vivaient heureux. Du moins le pensaient-ils. Un jour leur maman eut un accident. Alors Henri, Philippe et Louis se mirent à se questionner le sens de leur vie. Une grande vague de doutes pour ces quarantenaires versaillais sans histoire, qui suffit à leur faire entrouvrir la porte à l'inédit, à l'interdit, à l'aventure … au Grand Méchant Loup !
De maison de paille en maison de bois, le loup aussi sexy soit-il délogera-t-il nos trois frères ? Et l'hôtel particulier en pierre de taille de l'aîné, est-il vraiment si solide ? Et si au bout du compte la vie d'adulte n'était pas complètement un conte pour enfant ?
Postulat étrange que d'avoir choisi l'histoire des trois p'tits cochons pour l'adapter en format comédie française populaire. Les deux compères Nicolas & Bruno s'emparent du conte pour en livrer une version versaillaise moderne. Divisé en trois parties – inéquitables – chacune focalisée sur l'un des frères, réfugié respectivement dans une maison de paille, de bois et de pierre, « Le Grand Méchant Loup » est avant tout un film sur l'infidélité et l'adultère, doublé d'une analyse profonde sur la recherche du bonheur, et la quête d'une identité. Pas de quoi pouffer de rire sur le papier. Et c'est en soi le vilain défaut du « Grand Méchant Loup ».
Rappelez-vous, « Les Infidèles » l'an dernier. Sur un thème similaire, le long métrage du tandem Dujardin / Lellouche se vautrait convenablement à force d'aligner séquences ultra sérieuses, à la limite du malaise, alternant avec des scènes potaches nettement plus poilantes, à la Judd Apatow. Une association bancale, dynamitée par une écriture maladroite et un casting inégal. Côté références, on pense également ici fréquemment à Yves Robert et ses « comédies de bande » sucrées salées « Un éléphant, ça trompe énormément », sa suite « Nous irons tous au paradis », mais aussi aux « Copains d'abord ». De très bonnes influences, en somme ! Enfin, la paire Nicolas & Bruno s'octroie judicieusement le droit de quelques détournements bien placés (les films d'Arnaud Desplechin, la série « Big Love » …).
À mi-chemin entre la comédie pure – quelques scènes tordantes (le village mormon, l'explication de Fred Testot sur les films pornos aux titres rigolos) – et le drame familial hyper sérieux, « Le Grand Méchant Loup » jongle entre les genres et trouve difficilement son rythme et ses nuances. C'est d'ailleurs paradoxalement lorsqu'il est drôle, absurde, misogyne et maladroit que « Le Grand Méchant Loup » est en fait le plus émouvant, et non lorsqu'il s'interroge sur les conséquences de l'infidélité. Seulement voilà, on attendait peut être quelque chose de moins téléphoné et de nettement plus stimulant de la part des auteurs de l'abracadabrantesque « La Personne aux deux personnes ».
Les trois petits cochons s'appellent ici Riri, Fifi et Loulou, du nom des neveux malins et débrouillards de Donald Duck, et sont campés – avec métier – par Benoît Poelvoorde, Fred Testot et Kad Merad. Si les personnages des deux derniers recèlent quasi du caméo, c'est surtout grâce à l'excellente interprétation de Benoît Poelvoorde, qui crève l'écran une fois n'est pas coutume. Mais, oui il y a un mais, l'acteur semble parfois enchaîné par ses réalisateurs, comme si le tempérament déjanté du monsieur était sans cesse remis en question et stoppé en plein vol. Vraiment dommage ! Finalement, c'est Charlotte Lebon qui tire réellement son épingle de jeu en livrant une prestation malicieuse et pertinente, pleine de charme et d'intelligence, à mille lieux de la femme – maîtresse – objet qu'impose généralement ce type de film. Les autres comédiennes, Valérie Donzelli, Zabou Breitman, Cristiana Reali, Léa Drucker et Linh-Dan Pham, ne sont pas en reste cela dit, avec des rôles très bien écrits et des répliques souvent drôles.
Bilan : Une comédie en demi-teinte pour le duo Nicolas & Bruno. Si « Le Grand Méchant Loup » se consomme avec plaisir, il joue hélas parfois un peu trop la carte du partage entre les genres, de la chronique de mœurs élégante au « film de bande », en passant par la comédie populaire.