La Tour de Guet : les secrets du tournage

La Tour de Guet est le second long métrage de fiction de la réalisatrice Pelin Esmer. Il a été présenté à de multiples festivals comme ceux de Nuremberg, Göteborg, Fribourg, Hong Kong, La Rochelle. Le film a également été en sélection officielle pour le Toronto International Film festival (TIFF) et a remporté 5 récompenses au festival d’Adana en 2012 avec les prix de la meilleure réalisatrice, meilleure image, meilleure actrice, meilleurs seconds rôles féminin et masculin. Pelin Esmer a également récolté le prix de la fiction et le prix du public au festival du Film d’Environnement de Paris.

La cinéaste Pelin Esmer nous raconte comment ce film a germé dans son esprit : "La culpabilité et le sens moral étaient les inspirations principales. Puis les lieux... Une fois que la tour de guet et la station-service sont apparus dans mon esprit, les personnages ont suivis". Il fallait donc un lieu reculé et particulièrement fort pour coller à l’histoire des personnages : "Il y a quelques années, j’ai vu une photo d’une tour de ces tours dans le journal, je n’avais jamais entendu parler de ça auparavant. Une famille vivait là, au milieu de nulle part, à regarder la forêt toute la journée. C’était leur travail. Quelques années plus tard, quand j’ai commencé le scénario et l’élaboration du personnage de Nihat, cette tour m’est revenue à l’esprit…"

Pour la réalisatrice, le choix des lieux était aussi important que les personnages. La tour de guet est l’endroit qui permet à Nihat de regarder le monde tout en restant en retrait. Le tournage a eu lieu du côté turque de la mer Noire aux environs de Tosya et Cide dans la province de Kastamonu. Le plus difficile a été de repérer des tours et des stations : "Il ne reste plus beaucoup de ces tours ou de ces vieilles stations de bus, elles ont, en parti, été remplacées par de gros complexes commerciaux". C’est par hasard que Pelin Esmer est tombée sur la station du film qui était, de plus, proche du lieu de la tour : "L’endroit était étonnamment similaire à ce que je m’étais représenté en l’écrivant. Même le lit de Seher était là, la première fois que je suis rentrée dans la chambre !" 

En tant que femme, Pelin Esmer a très vite compris que sa place dans l'industrie cinématographique était pointée du doigt. La cinéaste répond aux critiques de cette société conservatrice turque par le moyen le plus simple mais le plus pertinent selon elle : "le silence", qu'elle illustre à l’image de la mère de Seher (Nilay Erdonmez) au moment où elle se tait face au scandale et à la honte que cache sa fille. Par cette réaction, Esmer dénonce le machisme et la soumission féminine que subissent les femmes en Turquie.