Je suis partagé. En fait, c'est très bien, soit, oui c'est scotchant (et carrément révoltant, oui)! Mais... Qui a financé tout ça? On parle de ce qu'on nous montre mais sans presque aucune mise à distance. C'est sensationnaliste mais on ne voit pas vraiment de réflexion. Et pourquoi on ne montre que les hommes et garçons? Les femmes, les filles, ben y en a pas, elles sont jamais là, en tous cas au cœur de l'action (sinon aux fourneaux ou à préparer les fêtes de maisonnée): on ne sort pas d'un certain patriarcat! Même le tout petit, parce que c'est le bon gros dernier, on en fait un peu un "dur", qui doit pas avoir peur, comme enrôlé, même lors des attaques de bombes au gaz lachrymo... Assez désolant.
Quand la mère de famille sort "arrête de filmer, pourquoi tu fais ça, arrête!", et elle a raison; mais Emad Burnat, lui, tient à son projet, à ses risques et périls (de fait!), et ne cesse qu'à l'approche de la limite.
Avec d'un côté les tireurs d'élite aux ordres d'un pouvoir ultra nationaliste infect (les mots nazis, ghetto de Varsovie viennent résonner dans nos têtes - sans commune mesure, mais c'est quand même fou), qui savent bien viser en plein dans la caméra (! ou ailleurs...) et de l'autre, des manifestants sans défense ou presque (y a les projectiles, les recours juridique et médiatique), on est en présence d'un rapport de force clairement inégal. En fait, ce type de documentaire a quelque chose de franchement déplaisant, parce qu'il offre une mise en scène de la résistance d'un village à travers des personnages qui passent pour totalement innocents: on ne peut donc qu'être touchés, dégoûtés, écœurés
(y compris... lors du sacrifice du mouton)
, remués voire tourneboulés. Mais ensuite, au-delà? Le film a été en partie financé par des Israéliens qui en ont marre de la politique des ultras, qui contestent le pouvoir et s'opposent à la politique de violation de territoires qu'implique la colonisation à marche forcée. Ils ont raison, on ne peut qu'être d'accord. Le mal viendrait de Jérusalem. Et ici, c'est rien par rapport à ce qu'a connu Gaza. Mais ce serait faire vite si on oubliait aussi, de l'autre côté, la haine abjecte et le danger de l'islamisation phallocrate. Bien sûr, ici c'est une famille qui s'expose, qui montre une partie de son quotidien. Ça a l'air triste comme ça mais viennent aussi des moments de réjouissance et ces Palestiniens ne vivent pas dans la misère, loin de là. Au final, ce film est certes efficace mais aussi particulièrement déplaisant car mono-centré, sans recul ni contextualisation.