Déjà réalisateur de La Route il y a quelques années, John Hillcoat fait parti de ces réalisateurs pro-indépendants, créateurs de films sensibles, recherchés, intelligents. Se distinguant des films classiques, par l’utilisation quelque peu massive de plans chocs, d’une morale autrement différente qui prône la victoire des riches, de dialogues davantage basés sur la personnalité humaine que la situation de crise, Des Hommes sans Loi est l’archétype parfait de ce genre de production. L’histoire, simple de premier abord, est traitée très intelligemment par Hillcoat, qui use d’images parfois très crues et d’un questionnement psychologique sur les pensées de ses personnages. Ainsi, plongé dans un contexte de Prohibition dans l’Amérique des années 20, un peu comme le présente Boardwalk Empire, le réalisateur se sert de ce contexte pour conter l’histoire de trois frères, interprétés par Shia LaBeouf, Jason Clarke et Tom Hardy. Ayant chacun ses forces et ses faiblesses, c’est cette fraternité qui représente le cœur de l’histoire, c’est elle qui va déterminer de l’ambiance générale du métrage et alors retracer historiquement l’affaire Bondurant. Sans s’attarder sur les rôles de Guy Pearce, caricaturant l’Etat davantage préoccupé par l’arrestation des malfaiteurs que de l’éthique qui le régit, ou de Gary Oldman, dans un rôle de gangster qu’il assume pleinement, sans démesure, le scénario s’avise à disséquer au mieux les relations fraternelles. Shia LaBeouf, dans le rôle du benjamin de la famille, est sans cesse confronté aux moqueries de ses frères, plus matures et plus responsables. En revanche, Tom Hardy, l’aîné de la fratrie désigné comme père de famille, est protecteur, calme mais pourtant prêt à tout. Le film s’axe d’ailleurs dans une dynamique de responsabilisation : LaBeouf, en jouant de ses relations et de persévérance, gagne en profondeur, trouve l’amour et essaye tant bien que mal de prendre la place de son frère. Des relations et un commerce d’alcool qui ne sera pas sans altercations, fréquemment baigné dans le sang et le crime. La belle photographie du film et la douceur de sa bande-son viennent relativiser le chaos auquel l’on prend part, et Jessica Chastain, belle comme un cœur, fait la part belle à l’instabilité qu’elle déclenche. En dépit d’une fin trop facile mais révélatrice de l’indestructibilité des trois frères, Des Hommes sans Loi s’avère être, à juste titre, une bouffée d’oxygène dans un contexte en perte d’originalité, un pavé dans la mare destiné à ces scénaristes qui fonctionnent à vitesse réduite. Le film, lui, respecte les valeurs qu’il inculque, il brise les règles.