L'Extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet est l'adaptation du roman du même nom écrit par le jeune écrivain Reif Larsen publié en 2009. Il s'agit du premier roman de l'auteur américain.
Jean-Pierre Jeunet a décidé de se lancer dans cette adaptation sous l'impulsion de son lecteur attitré, Julien Messemackers, qui lui a fortement conseillé de s'intéresser à ce livre en particulier. Le réalisateur avoue avoir fait cette demande pour une simple raison : "Après Micmacs à Tire-Larigot (2009), je n’avais pas envie d’écrire à nouveau une histoire originale."
L'auteur du roman Reif Larsen, dont L'Extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet est issu, a suivi de très près l'adaptation de son oeuvre par Jean-Pierre Jeunet, si bien que le réalisateur lui a demandé de faire une apparition à l'écran dans un caméo de figuration.
Jean-Pierre Jeunet a une façon bien particulière de travailler sur l'adaptation d'un roman : "J’ai pris le livre et j’ai commencé à le colorier : tout ce que j’aimais beaucoup ou que je pensais indispensable au récit en rouge ; ce que j’aimais moyen en jaune ; ce que je n’aimais pas du tout en vert. J’ai découpé les pages et les ai rangées dans des chemises, et à partir de là, j’ai rebâti une histoire en quelque sorte, en n’hésitant pas à mélanger les éléments", raconte le réalisateur qui s'est mis ensuite à l'écriture du scénario avec son complice d'écriture de toujours depuis La Cité des enfants perdus (1993), Guillaume Laurant.
Pour Jean-Pierre Jeunet, il était impensable de faire son film aux Etats-Unis, il ne voulait pas avoir à céder sa liberté sur le "final cut" (le montage final du film). L'astuce du réalisateur a donc été de monter la production du film à Paris et de trouver des associés au Canada afin de pouvoir tourner en Amérique du Nord.
Si le film paraît américain, les deux seuls éléments venant des Etats-Unis sont le roman d'origine et le jeune comédien Kyle Catlett qui incarne T.S. Spivet. En effet, le reste de l'équipe est soit français, soit canadien à l'exception d'Helena Bonham Carter qui est britannique et Judy Davis qui est australienne. Il en est de même pour les décors puisque les deux principaux lieux de tournage ont été Alberta et Montréal, respectivement province et ville canadiennes.
Après avoir subi un long processus pour caster le jeune Kyle Catlett dans le rôle-titre, la production a essuyé plusieurs problèmes. En effet, lorsque Jean-Pierre Jeunet a annoncé à l'acteur qu'il avait été choisi, il venait de signer pour jouer dans la série The Following (2013) alors que son agent avait assuré sa disponibilité. Par la suite, l'équipe n'a pas pu s'arranger avec la série pour organiser un emploi du temps correct. C'est ainsi que la production a mis en place un hélicoptère privé pour faire le voyage du jeune comédien chaque nuit de la semaine.
Le discours final du film a été l'un des moments de tension énorme au moment du tournage pour Jean-Pierre Jeunet. En effet, le jeune comédien Kyle Catlett devait dire son texte - long de près de 7 minutes - d'une traite. D'autant qu'il aurait pu être facilement impressionné face à un public de 130 figurants qui l'écoutait avec la plus grande attention. Le plan a nécessité uniquement deux prises dont la première a été interrompue. Le réalisateur se souvient : "Il s’est soudain arrêté de parler, la coach lui a alors soufflé le texte, il l’a regardée et lui a dit : "Ce n’est pas un trou de mémoire, c’est une pause… Si j’ai un trou de mémoire je bougerai mon pied comme ça." Un vrai professionnel !"
Le personnage du sous-secrétaire du Musée Smithsonian a connu bien des changements. Dans le roman original, c'est un homme, qui est devenu une femme sous les traits de Kathy Bates. Suite à l'hospitalisation de la comédienne, le personnage est redevenu un homme alors interprété par Robin Williams, qui a fini par décliner le rôle quelques jours avant le début du tournage pour finalement passer le flambeau à une femme : Judy Davis.
Jean-Pierre Jeunet retrouve une nouvelle fois le comédien Dominique Pinon qui interprète le rôle de Deux Nuages. Malgré l'association évidente entre l'acteur et le réalisateur - il s'agit de leur septième collaboration depuis Delicatessen (1991) -, il a bien failli ne pas apparaître dans ce film étant donné qu'il devait donner une représentation théâtrale à Paris au moment du tournage. Il a cependant fait le déplacement jusqu'à Montréal pour une journée de tournage et est reparti aussitôt ses scènes terminées.
Si Jean-Pierre Jeunet retrouve la quasi-intégralité de son équipe habituelle, il a dû se séparer de son directeur de la photographie fétiche, Bruno Delbonnel. Le réalisateur explique : "Il venait de faire deux films américains – Dark Shadows (2012) de Tim Burton et Inside Llewyn Davis (2013) des Frères [Joel et Ethan] Coen – et ne pouvait pas enchaîner avec un troisième et rester aussi longtemps loin de la France et de sa famille". Une aubaine pour Thomas Hardmeier qui a été choisi par le metteur en scène grâce à son CV.
L'Extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet est le premier film que Jean-Pierre Jeunet a tourné avec la technique de la 3D. Le réalisateur avoue avoir dû faire des concessions et faire bouger sa caméra plus lentement qu'il l'aurait pensé pour que cela donne un beau rendu.
Pour la musique, Jean-Pierre Jeunet a fait appel au musicien canadien Denis Sanacore, qui compose pour la première fois au cinéma. Leur collaboration est assez particulière étant donné que Jeunet lui a demandé de composer des thèmes sans forcément voir les images du film et le réalisateur a fait sa sélection après coup. La musique de Sanacore n'a d'ailleurs pas été enregistrée en studio mais chez lui : "dans son salon, en débranchant le téléphone et en faisant taire son chien", précise Jeunet.
Le producteur Harvey Weinstein a décidé de distribuer L'Extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet sur le territoire américain avant même que le film soit terminé. Il avait déjà distribué un autre film de Jean-Pierre Jeunet qui a eu un fort succès aux Etats-Unis, Le Fabuleux destin d'Amélie Poulain (2001) sous le sobre nom de "Amélie".
Le rôle de T.S. Spivet est le premier dans un long métrage au cinéma pour le jeune comédien Kyle Catlett. Il avait déjà eu quelques rôles à la télévision notamment dans Mercy Hospital (2009), Unforgettable (2011) et The Following (2013).