Jean-Pierre Jeunet retourne Outre-Atlantique pour tourner l’extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet, un film à l’image de sa fascination perpétuelle pour l’étrange et le cocasse. Pour autant, même si la bande annonce laissait entrevoir une très belle fable en l’honneur de la détermination, il n’en n’est rien, tant le film du cinéaste français semble niais. Centré sur ledit T.S., un gamin du Montana, le film n’est qu’un blême road movie qui voit un gosse de dix ans traversé les Etats-Unis en vue de recevoir des mains du plus prestigieux des établissements scientifiques de la capitale un célèbre prix pour son travail sur le mouvement perpétuel. Si le travail esthétique du Jeunet est certes moins exubérant que sur une bonne majorité de ses œuvres passées, il en ressort toutefois cette approche très singulière d’une destinée qui ne l’est pas moins.
Tout est ici drapé d’une innocence toute enfantine, si bien que l’intégralité du métrage sonne passablement faux, soit naïf. Le monde vu aux travers des yeux d’un enfant est toujours délicat à mettre en scène. Beaucoup s’y sont essayer et finalement peu ont réussi à rendre un copie réellement satisfaisante. Jean-Pierre Jeunet, lui, manque complètement le rattachement de cette narration enfantine à l’univers des grands, tant et si bien que tous les personnages, y compris le jeune enfant, semble désincarnés, sans le moindre charisme. Même Helena Bonham Carter, fidèle actrice du genre décalé, est aux anthipodes de ce qu’elle pourrait offrir sous la direction de notamment son mari à la ville, Tim Burton. En somme, à vouloir l’enchantement, le réalisateur se plante sur le fondement même du but d’un tel film, à savoir toucher le public au cœur.
Oui, malgré le coté comique qui prédomine, le dernier film de Jeunet s’affiche pourtant comme un drame édulcoré. Le deuil, la fugue, l’absence de sentiments en famille, autant de thèmes abordés par le réalisateur sans que jamais le public n’y soit touché, ni même captiver. Le final, en forme de réconciliation public, un truc typiquement américain, marque le final d’un film bancal qui avait pourtant bien d’avantage à proposer, à vue de nez du moins. N’étant ni un fan ni un détracteur du travail de Jeunet, duquel en ressort aussi bien d’énormes qualités que de gros défauts, il paraît pourtant incontestable, que l’on aime ou pas le bonhomme, qu’ici, le metteur en scène est en mode mineur. Manque d’inspiration ou auto-complaisance? Allez savoir.
Trop naïf, trop désincarné, l’extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet est un film clairement dispensable qui, au mieux, vous donnera, à quelques occasions, le sourire. L’humour est d’ailleurs la seule bouée de sauvetage pour Jeunet qui manque complètement son approche dramaturgique du son histoire. Personne n’en sort réellement égratigné, mais personne non plus n’en sort grandit. Dommage. 08/20