Seulement un an après Django Unchained, dernier film ayant pour thématique l'esclavage nord-américain au XIXème siècle, Twelve Years a Slave marche sur les traces de Tarantino, mais sans en atteindre le niveau.
Adaptation cinématographique de l'autobiographie "Douze ans d'esclavage", rédigée par l'un des plus grands défenseurs de l'abolition de la traite négrière, Solomon Northup (1808-1857), ce drame historique est porté sur grand écran grâce au réalisateur montant Steve McQueen. Fidèle à l'exactitude historique, le cinéaste américain revient sur le kidnapping dont a été victime Solomon Northup, homme libre enlevé et vendu comme esclave dans une plantation de la Louisiane.
Nommé dans huit catégories de la cérémonie des Oscars 2014, lauréat dans trois d'entre elles ("meilleur film", "meilleur acteur" et "meilleure actrice dans un second rôle"), ce film d'époque permet au spectateur une immersion complète et rapide grâce à des décors et des costumes soignés qui, eux, n'ont malheureusement pas été récompensés.
Mais le thème choisi de l'esclavage n'est pas le seul point commun avec Tarantino, puisque Twelve Years a Slave est également le film des retrouvailles entre Michael Fassbender et Brad Pitt après Inglorious Basterds. D'ailleurs, la distribution de Twelve Years a Slave place la barre haute en terme de qualité. Premier à avoir rejoint le projet et habitué de travailler sous la houlette de Steve McQueen, Michael Fassbender incarne ici le redoutable esclavagiste Edward Epps, à la réputation historique d'homme brutal et impitoyable. Mais bien qu'étant dans la peau du principal antagoniste du film, l'acteur irlandais parvient à nous présenter le portrait d'un homme tourmenté, rongé par l'alcoolisme et détesté par sa femme, trouvant un équilibre à la fois complexe et précis. Face à lui, Chiwetel Ejiofor, qui atteint la consécration grâce à son interprétation du héros, récompensé par l'Oscar 2014 du meilleur acteur bien que sa prestation ne soit pas toujours convaincante. On regrette les courtes apparitions de Benedict Cumberbatch et Brad Pitt, tous deux brillants d'humanité dans un milieu esclavagiste souvent monstrueux et apportant une lueur d'espoir face aux atrocités commises sur les esclaves. A ce titre, la présence de Paul Dano, habitué aux rôles d'hommes peu recommandables, nous livre un jeu d'acteur tout aussi satisfaisant. Enfin, on peut faire le même constat à propos de Sarah Paulson, détestable mais excellente dans le rôle de l'épouse esclavagiste.
Un autre atout indéniable du film, cette fois dans l'équipe technique : la présence du talentueux Hans Zimmer, que l'on ne présente plus, créateur de la bande-originale puissante et aussi tragique que le destin de Solomon. Toutefois, ces qualités de mise en scène et de création musicale ne mettent pas de côté quelques faiblesses et maladresses.
D'abord, un usage de la musique parfois abusif, notamment lors de la pire scène du film, qui en altère la force émotionnelle et dramatique. Ensuite, un épilogue bâclé qui ne nous permet pas de savourer pleinement cette "happy end", toutefois contrariée par le remplacement d'un époux disparu, un aspect qui aurait mérité d'être légèrement développé pour appuyer les ravages du temps que le cinéaste a notamment cherché à montrer à travers les costumes. Enfin, la frustration des apparitions trop brèves de personnages au potentiel inexploité.
Résultat : un projet qui s'inscrit dans la lignée des autres témoignages cinématographiques abordant cette dimension honteuse de l'histoire américaine, mais qui souffre d'une hétérogénéité et d'un style encore trop maladroit.