C’est son fils qui a conseillé à Jean Becker de lire le roman d'Eric Holder, "Bienvenu parmi nous", sorti en 1998. A la première lecture, le metteur en scène l'a d’abord trouvé très noir, alors qu’il souhaitait réaliser un film lumineux et optimiste. Mais, très vite, Jean Becker a décelé le potentiel d'exprimer ce qu’il cherchait : "C’est le parcours d’un homme un peu perdu qui rencontre une jeune fille de 15 ans qui, elle-même lâchée par sa famille, va s’accrocher et lui en faire voir, comme si elle était sa propre fille. Sur la base de cette trame, tout s’est mis en place pendant l’écriture. Je me demandais ce qu’ils pouvaient se dire suivant les circonstances. Je me suis dit qu’on allait les faire vivre au jour le jour jusqu’à la fin, en se laissant porter par l’évolution de leurs sentiments."
Ce n'est pas la première fois qu'un roman d'Eric Holder est adapté au cinéma. En effet, L'Homme de chevet (2009), avec le couple Christopher Lambert et Sophie Marceau en vedette, et Mademoiselle Chambon (id.), qui réunit Vincent Lindon et Sandrine Kiberlain, sont tous deux des adaptations de romans du célèbre auteur.
Jean Becker souhaitait depuis de longues années faire un film avec Patrick Chesnais. Il l’avait, notamment, déjà auditionné pour L'Eté meurtrier (1983), mais à l’époque la production n’avait pas voulu de lui. Ainsi, quand il a commencé à s’intéresser à cette rencontre entre un homme vieillissant et une jeune adolescente, le réalisateur a, tout de suite, pensé au comédien : "Je lui ai proposé un traitement de l’histoire et lorsqu’il m’a donné son accord, j’ai écrit pour lui."
Dans Bienvenue parmi nous, Taillandier, le personnage joué par Patrick Chesnais, est frappé par la dépression. Le comédien déclare : "C’est un homme qui a tout : le succès, une femme charmante, des enfants épanouis, une belle maison… Et c’est un créateur. Malgré cela, plus rien ne l’intéresse". Pour se préparer à ce rôle, Chesnais a lu "Face aux ténèbres" de William Styron, un ouvrage dans lequel ce grand auteur américain raconte sa propre dépression.
Pour incarner Marylou, l’adolescente qui se lie d’amitié avec le personnage de Patrick Chesnais, la directrice de casting Sylvia Allegre s’est souvenue d’une jeune actrice qu’elle avait auditionnée pour le précédent film de Jean Becker, La Tête en friche. Le réalisateur se souvient : "Chez cette petite, je sentais un instinct. C’est une fille qui, malgré une image trompeuse de superficialité, peut vraiment être profonde". Marylou est le tout premier rôle de Jeanne Lambert, comédienne qui avait par ailleurs commencé par le théâtre.
Jeanne Lambert a un souvenir très précis de sa première scène jamais tournée pour le cinéma. C’était une scène de petit déjeuner, qui se trouve vers la fin du film, avec Miou-Miou et Patrick Chesnais. La jeune actrice raconte : "C’était la première fois où l’on me maquillait, où je me préparais vraiment dans mon personnage, aussi bien physiquement que mentalement. En fait, c’est le premier jour où j’ai pratiqué mon métier."
Patrick Chesnais et Jeanne Lambert sont bien entourés dans Bienvenue parmi nous. En effet, on retrouve dans le film Miou-Miou et Jacques Weber en seconds rôles. Au mois de juin 2012, ces deux grandes personnalités du cinéma français peuvent également être vues dans Quand je serai petit (Miou-Miou) et Arrête de pleurer Pénélope (Jacques Weber).
Sans encourager l’improvisation (qu’il n’apprécie pas trop), Jean Becker aime laisser ses acteurs dire le texte à leur manière : "S’ils contrarient trop la vision que j’ai, et que ce qu’ils me proposent n’est pas bon, je le leur dis, mais le plus souvent, cette écoute et cet échange apportent au film", explique le metteur en scène.
Dès qu’il le peut, et ce depuis Les Enfants du marais (1999), Jean Becker travaille avec, au moins, deux caméras : "Vous pouvez travailler en double valeur, pour aller au plus près ou sur quelque chose de plus général. Le choix se fait ensuite au montage", explique-t-il, en terminant : "Il y a tellement d’émotions qui passent sur le visage [des comédiens] que si vous êtes un peu loin, vous la perdez. Si vous approchez vraiment, vous la captez."
Au début de Bienvenue parmi nous, le personnage de Patrick Chesnais, complètement déprimé, tente de mettre fin à ses jours sans y arriver, ce qui n'est pas forcément facile à mettre en scène. Jean Becker déclare : "J’avais tourné le moment où il prenait le fusil, le chargeait, et puis je me suis dit que la seule façon de pouvoir le faire accepter aux gens, était que ça se passe à une rapidité incroyable. Il prend le fusil, il le pointe, il hurle et s’en va. C’est fini. On a compris qu’il n’y arrive pas. C’est la vitesse qui fait qu’on l’accepte."
Dans une scène de Bienvenue parmi nous, Marylou regarde la télévision et c’est L'Eté meurtrier (un film de Jean Becker sorti en 1983) qui y passe. Le réalisateur explique ce choix : "Je cherchais simplement une scène d’une fille avec sa mère, pour qu’elle soit touchée. Pourquoi aller chercher ailleurs ?"