Parmi les nombreux longs-métrages qui ont exploité le système de la rotoscopie (prendre des prises de vues réelles pour en faire une animation), de Blanche-Neige et les 7 nains à cet Aloïs Nebel, on se souvient particulièrement d’un très bon Valse avec Bachir de l’israélien Ari Folman. C’est dans cette même veine que s’inscrit le film d’animation de Tomás Lunák, par son esthétique comme pour son fil narratif composé de réminiscences énigmatiques et mélancoliques. Néanmoins, Aloïs Nebel peine à laisser transparaitre ses nombreuses idées de façon claire et certaine.
Tout d’abord, le fait que la caméra s’adapte au regard du protagoniste, sans utilisation de caméra subjective cependant, dans la majeure partie du film donne lieu à une dimension quasiment onirique. Par conséquent, il y avait sans aucun doute de quoi exploiter cette infinie richesse picturale pour donner lieu à un long-métrage plus que transcendant. Toutefois, la mise en scène manque cruellement d’aboutissement et peine à mettre en valeur un scénario qui possède malgré tout un certain charme. En effet, Aloïs Nebel, sous une forme très belle, s’handicape avec un côté brouillon hélas trop présent pour ne pas affecter la compréhension du spectateur.
Ainsi, dans les premières minutes, nous sommes placés dans un monde qui nous est entièrement étranger. Nous ne disposons d’aucune clé qui pourrait nous éclairer, dans ce brouillard qui semble tout autant préoccuper le personnage principal – en proie aux fantômes de son passé. Aloïs Nebel nécessite donc une bonne demi-heure pour enfin cerner l’histoire qui se déroule sans pour autant connaître les facettes moins dominantes du film. De fait, le long-métrage ne sera pas parvenu à égaler la grandeur d’un Valse avec Bachir et, parmi tous les instants qui le composent, il est difficile de se souvenir de l’intégralité des évènements.
Enfin, l’autre handicap du film se situe dans sa lenteur, qui tend de nouveau à semer le spectateur. Bien entendu, ce n’est pas là sa plus grande faiblesse dans la mesure où la durée n’est que d’1h20. Et puis comme j’ai pu le mentionner ci-dessus, Aloïs Nebel est loin d’être exempt de qualité puisque les quelques moments que nous sommes en mesure de comprendre sans peine s’avèrent touchants et, par conséquent, plein d’émotion. À tel point que l’on ne peut que regretter d’être passé à côté de la première partie.
En conclusion, Aloïs Nebel est loin d’être mauvais et aurait même pu se montrer excellent si la mise en scène n’avait pas été aussi bâclée. L’histoire d’Aloïs Nebel, baignant dans une certaine dimension biographique – le personnage étant inspiré du grand-père du réalisateur lui-même –, est émouvante et tout de même bien mise en valeur par un univers esthétique très réussi, tirant profit du style bande-dessinée dont il est issu.