Le nom d'Oradour-sur-Glane, lorsqu'il est replacé dans le contexte de la Seconde Guerre mondiale, évoque le plus important massacre de civils mené sur le territoire français de tout le conflit. Ainsi, le 10 juin 1944, une division de la Waffen-SS s'est rendue dans ce petit village près de Limoges et a procédé au meurtre méthodique de toute sa population : les hommes furent fusillés, tandis que les femmes et enfants furent enfermés dans l'église à laquelle les soldats mirent le feu. Seuls une trentaine d'habitants ont survécu à l'évènement. Le village, laissé en l'état, est aujourd'hui un haut lieu de la mémoire de la Guerre en France.
De manière tout à fait symbolique, ce documentaire est une coproduction franco-allemande, ce qui, pour Robert Hébras, permet de souligner que la mémoire est commune et que le peuple allemand n'a pas à être tenu pour responsable des évènements de juin 1944. Pour le CMO (Centre pour la Mémoire d'Oradour) qui soutient le film, la sortie du film dans ces deux pays s'inscrit également dans "l’émergence d’une citoyenneté européenne".
Loin d'adopter le point de vue d'un historien, le réalisateur dit avoir voulu privilégier "la subjectivité [du] témoignage, ne décrivant que ce qu’il a vu et vécu". Ainsi, aucune correction ou coupe n'est apportée lorsque le souvenir se montre vague ou erroné. Pour la même raison, Robert Hébras est toujours filmé de dos et apparaît ainsi comme le guide des spectateurs : c'est sa vision des évènements qu'il nous invite à découvrir. Le documentaire repose donc sur cette double visée apparemment contraire d'un cinéaste voulant illustrer un destin individuel et d'un témoin se voyant avant tout comme le porte-parole d'une mémoire collective.
Outre le désir de transmettre son message de paix, Robert Hébras a été fort intéressé par le bilan rendu possible par ce long-métrage. En effet, le documentaire traite aussi bien de l'évènement en lui-même que de ses répercutions sur la vie d'un homme et sur l'évolution de son combat. Ainsi, le témoin explique que ce tournage lui "a permis de réfléchir à ce qu’avait été [son] discours depuis toutes ces années". Mémoire, donc, mais également réflexion sur la mémoire.
Afin que les images épousent parfaitement le récit du témoin, le réalisateur Patrick Séraudie a beaucoup travaillé sur l'éclairage. Ainsi, si le tournage s'est déroulé en juin (tout comme les évènements rapportés) afin de présenter une lumière estivale, il a également suivi la chronologie du drame : l'éclairage naturel de la ville suit le témoignage depuis l'arrivée des troupes allemandes à 14h00 à la fuite des survivants à 19h30, en passant par le rassemblement de la population à 16h00.
Afin de faciliter au spectateur la recréation mentale de la ville telle qu'elle était avant le drame, le réalisateur a fait appel à un jeune architecte, Benjamin Corbeau, qui avait consacré son mémoire de fin d'études à Oradour-sur-Glane. Celui-ci a ainsi pu recréer par images de synthèse les bâtiments et leur disposition de 1944, permettant donc d'expliquer où et comment les témoins se sont cachés pour fuir.
Bien que le cinéma permette au documentaire d'être diffusé à l'échelle nationale et donc d'atteindre un très large public, son objectif final reste éducatif. Avant même la sortie en salle, le CMO (Centre pour la Mémoire d'Oradour) avait ainsi réfléchi à la sortie du dvd, qui s'accompagnera d'un livret pédagogique visant à amorcer une étude du sujet en classe ou préparer une visite du site.