Avec cette biographie, les frères Coen renouent avec la veine musicale d' O Brother (auquel j'ai parfois pensé même si les univers sont différents.).
L'occasion de livrer une fois de plus un portrait de loser patenté dont ils se sont fait une spécialité.
Mais le ton est ici assez différent de la plupart de leurs films, ce qui me fait dire qu'il s'agit d'une de leurs œuvres les plus accessibles. On n'y retrouve pas cette ironie distanciée, ce mordant un peu vache; les Coen regardent au contraire leur personnage avec une profonde tendresse, une empathie même, inhabituelle (il n'y a qu'à comparer avec le traitement qu'ils réservaient au héros de A Serious Man).
Un tel regard nous fait ressentir la solitude, le froid, la fatigue et le manque de sommeil qui cernent Llewyn.
Le ton employé s'applique d'ailleurs à tous les personnages du film, qui gravitent dans le milieu des folkeux de Greenwich Village, un microcosme au sein duquel, malgré les divergences et les blessures, on se sert les coudes, on se prête les canapés, on vivote...et duquel émergera la figure iconique de Bob Dylan.
La description est minutieuse, l'image, qui baigne dans une lumière brumeuse inspirée de certaines pochettes folk, parfaite, et le scénario, dans sa structure cyclique, prouve la maîtrise parfaite des réalisateurs.
Au final, l'histoire de Llewyn Davis/Dave Von Ronk, c'est donc celle d'un artiste arrivé trop tôt, trop intransigeant ou peut être tout simplement pas assez talentueux. Son histoire, malgré les péripéties et les moments cocasses, est finalement profondément émouvante.