24 jours, la vérité sur l'affaire Ilan Halimi : les secrets du tournage

Première dans les annales de la PJ (Police Judiciaire), le mythique 36 Quai des Orfèvres a accueilli l'équipe de "24 jours, la vérité sur la mort d'Ilan Halimi" dans ses locaux le temps de quelques prises de vues. Arcady a profité du calme relatif régnant durant le week-end (celui des 19 et 20 octobre 2013) pour y installer ses caméras. Aucun policier n'a participé au tournage, aucun matériel n'a été prêté, la PJ s'étant contentée de louer ses murs à la production.

Ilan Halimi a été enlevé le 20 janvier 2006 et retrouvé le long d'une voie de chemin de fer le 13 février à Sainte-Geneviève-des-Bois (Essonne). Son corps était brûlé sur plus de 80% de sa surface et il avait reçu de nombreuses blessures. 19 personnes sur les 29 inculpées ont été condamnées dont Youssouf Fofana, présumé chef du "gang des barbares".

Le scénario du film est basé sur le livre éponyme co-écrit par la mère d'Ilan, Ruth Halimi et Emilie Frèche. Celle-ci a également co-signé le scénario. Alexandre Arcady explique pourquoi il tenait à adapter cette histoire : "J'ai fait 24 jours pour laisser une trace et dire la vérité, pour que cette tragédie ne tombe pas dans l'oubli. Aujourd'hui, quand vous parlez d’Ilan Halimi, peu de gens se souviennent de son nom. En revanche, quand vous évoquez le "gang des barbares", quelque chose résonne. C'est paradoxal de penser qu’en France les bourreaux sont plus connus que les victimes."

L'équipe de production et Alexandre Arcady tenaient à tourner dans les lieux où se sont déroulés les évènements. Ainsi, le tournage s'est effectué au 36 Quai des Orfèvres, à la gare de Sainte-Geneviève-des-Bois et dans le café du XIVème arrondissement. Tout cela pour retranscrire les émotions au plus près de la réalité et donner une réelle authenticité au film.

Le maire de la ville de Paris ainsi qu'une de ses adjointes ont rebaptisé l'un des parcs de la commune (dans le XIIème arrondissement) au nom d'Ilan (signifiant "arbre" en hébreu). Fruit du hasard, le parc se situe non loin de là où Ilan avait grandi et il avait beaucoup fréquenté ce lieu étant enfant.

C'est initialement l'actrice Valérie Benguigui qui aurait dû interpréter le rôle de Ruth Halimi. Mais celle-ci a dû se faire hospitaliser et c'est Zabou Breitman qui l'a remplacée à la dernière minute. Valérie Benguigui est décédée le 2 septembre 2013 des suites d'un cancer, c'était également le premier jour de tournage du film. Alexandre Arcady confie à propos de Breitman qu'elle a "repris le rôle au pied levé avec beaucoup de courage, de vérité et d’émotion." L'acteur Pascal Elbé ajoute quant à lui : "J'étais effondré. Je manquais de souffle, d'énergie j'étais dans une espèce d'état second. Je subissais les événements comme mon personnage. Je pensais à elle en me disant que je devais lui donner la réplique. C'était une expérience très forte, très violente."

24 jours, la vérité sur l'affaire Ilan Halimi est dans la continuité des autres films d'Alexandre Arcady qui ont toujours pour thème le Moyen-Orient et les conflits entre différents peuples. Celui-ci raconte pourquoi il était important d'adapter l'histoire d'Ilan : "La mort d'Ilan, le premier jeune juif à avoir été tué en France depuis la Shoah, est un événement qui m'a meurtri, comme il a meurtri beaucoup d'entre nous. Ce crime antisémite n'était pas un fait divers, mais un phénomène de société grave.(...) Donner l’alerte, ne pas rester les bras croisés, faire en sorte que cette tragédie nous ouvre les yeux. Et surtout, être du côté des victimes et non pas des bourreaux."

Alexandre Arcady raconte qu'il a eu beaucoup de mal à trouver des fonds pour produire son film. La production n'a pas rencontré le soutien de la télévision, ce qui a été selon lui un réel frein pour lancer la mise en chantier du film.

Zabou Breitman, qui a remplacé Valérie Benguigui au dernier moment, n'a pas eu le même temps que ses partenaires pour se préparer, mais déclare que "quand vous acceptez un tel rôle, il faut le travailler comme n'importe quel autre personnage (...) Il faut surtout ne pas le prendre avec des pincettes, il faut, au contraire, tout de suite entrer dedans. Pour respecter justement cette personne, il faut prendre la bonne distance, la jouer et aborder son personnage sobrement, en suivant le fil de l'histoire." Elle ajoute qu'"une forme de réalité ne doit pas s'imposer (...) il ne faut pas être spectatrice parce que je ne suis pas censée connaître le déroulement de l'histoire. Autrement, il n'y a plus l'insouciance au départ ni la terreur à l'arrivée."

Tony Harrisson, qui interprète Youssouf Fofana, s'est beaucoup investi pour son personnage. L'acteur déjà habitué aux rôles de méchants (il interprétait un délinquant sexuel dans La Squale) a envisagé son personnage comme "les méchants dans les films américains". Il a récupéré le maximum d'informations pour pouvoir construire son jeu et avoir "toutes les possibilités de comprendre l'histoire". Harrisson confie cependant qu'il s'était fixé une limite, celle de ne pas rencontrer Fofana, car "c'est un film et ce qu'il a fait est un acte odieux, ce n'est pas le genre de personne que j'ai envie de fréquenter. (...) Mon travail c'est qu'on y croit."