Comment expliquer ce coup de coeur? J'ai été littéralement transporté par l'assaut d'émotions délivré par Terraferma dans sa dernière partie. Film résolument politique, Terraferma relate l'histoire d'une famille sicilienne, ayant du mal à joindre les deux bouts avec le seul travail de pêcheur du grand-père, qui se retrouve hôte de clandestins éthiopiens. La police sicilienne s'empresse de les avertir en confisquant le précieux bateau du vieux. Débute alors un véritable affrontement entre les tenants de la loi, de l'Etat, supposés justement représenter la collectivité, et les pêcheurs, tenant de ce qu'ils appellent "la loi de la Mer" mais qui n'est autre que la loi de la vie, ce qu'on aime à appeler l'humanité. La distorsion entre la volonté du peuple et la volonté de l'autorité publique est ici mise en lumière, alors même que cette autorité, cette loi, est supposée émaner de la volonté de chacun de ces pêcheurs. Toute la première partie du film s'attache à dépeindre le quotidien du pêcheur. On est alors à la limite de l'ennui. Mais on comprend ensuite que tout participait à la mise en place du tableau final, principal: la dénonciation des politiques sécuritaires à l'encontre de l'immigration clandestine. La façon dont le peuple est piégé entre la sauvegarde de leur propre foyer, de leur travail, de leur propre vie, et la sauvegarde de celle des Autres, de ceux qui sont étiquetés comme "étranger" mais qui pourtant leur semble des leurs. En ce sens, la relation entre la mère de Filippo et la mère éthiopienne est poignante. Peu importe nos opinions politiques à ce sujet, on ne peut qu'être touché par l'ensemble. Pour ma part, je suis persuadé que certaines de ces scènes me reviendront souvent à l'esprit. Les acteurs (Donatella Finocchiaro, Giuseppe Fiorello, et Filippo Pucillo) sont tout simplement formidables et finissent d'insuffler au film cet esprit authentique et sincère qui touche tant. Choc inattendu.