Vénéré pour son Exorciste, adulé après French connection, William Friedkin n’a pourtant pas toujours fait consensus dans sa carrière. Pour preuve, son dernier en date, le peu amène Killer Joe, recevra lui comme d’autres un accueil mitigé en salles. On peut le comprendre. Tour à tour lent, violent, touchant puis cynique, il est avant tout extrêmement cru. Nous voilà plongés dans un décor aride, désert, où se côtoient les rustres, les simples, les tristes, couguars et ratés, un monde de cowboys rednecks solitaires où la clémence n’existe pas, où chacun cache sa noirceur sous la gouaille, les rires, derrière les silences, où les mieux lotis sont les plus coriaces, les plus insensibles et les fous furieux. Issu d’une pièce de théâtre, le film compose avec peu de personnages, certains juste évoqués, d’autres dont on découvre le caractère à mesure que la bobine avance, quand l’impasse se rend de plus en plus nette à ceux qui la nient, ceux qui renient, ceux qui se perdent et ceux qui s’assument. La question n’est plus de savoir qui s’en sortira, mais jusqu’où chacun ira. Les acteurs sont époustouflants, Matthew McConaughey en tête, mais le parti pris cruel et froid rebutera les âmes douces et autres adeptes de spectaculaire. Vous voilà prévenus.