Antoine Fuqua livre à chaque fois des films d’action de bonne facture, classique mais efficace. Avec Denzel Washington devant la caméra, qu’il avait déjà embauché pour Training Day, le réalisateur américain livre cette année Equalizer, inspiré de la série Equalizer diffusée sur CBS à la fin des eighties. Equalizer porte bien son nom, c’est un film écrit sur des papiers à musique avec juste le bon tempo.
Robert McCall (Denzel Washington) est salarié dans une enseigne de bricolage. Il semble mener une vie paisible. Insomniaque, il sort la nuit pour lire dans un bar où il discute de ses dernières lectures avec Teri (Chloë Grace Moretz), une prostitué du quartier. Lorsque celle-ci se fait agresser par un client puis corriger par son mac prénommé Slavi (David Meunier), la vie de Robert McCall bascule. Il décide de la venger et s’attire les foudres de la mafia russe dont Teddy (Marton Csokas) un redoutable mafioso prend la tête.
Equalizer prend son temps pour installer son personnage principal. C’est tout simplement parfait à l’heure où les personnages s’efface au profit d’une intrigue bourrine. Sans nous révéler grand-chose de Robert McCall, Fuqua nous invite néanmoins à appréhender calmement son état d’esprit. On le retrouve en train de faire ses courses, de travailler et de plaisanter avec ses collègues même quand il le raille, de conseiller son ami Ralphie (Johnny Skourtis) pour l’obtention d’un poste d’agent de sécurité. Robert McCall est un bon vivant, volontiers avenant avec ses proches, mais on détecte aussi qu’il semble maniaque et très minutieux. Teri est une femme terrorisée qui n’envisage pas pouvoir faire partie d’un autre monde que celui de proxénètes véreux. Chaque soir les récits de Robert lui donne un peu d’espoir. Robert lit Le vieil homme et la mer d’Ernest Hemingway et explique à Teri que la pêche du vieil homme a redonné un sens à sa vie. Juste avant la disparition de Teri, il entame la lecture de L’Ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche de Miguel de Cervantes. Heureuse allusion au rôle de chevalier d’une époque révolue qu’il ne va pas tarder à porter à nouveau.
La réalisation d’Equalizer est surprenante et agréable s’appuyant sur une photographie en clair-obscur bien étudiée tirant profit des lumières de la ville pour ne pas sombrer dans la pénombre comme le font trop de polar ou de films d’horreur où l’on ne distingue plus rien. La musique de Harry Gregson-Williams est juste suffisamment présente pour accompagner le héros réfléchi et calculateur. En fond, elle semble juste incarnait la ville et ses bas-fonds. C’est étonnant que Chloë Grace Moretz ai été choisie pour cette distribution. Elle qui jouait l’apprentie super-héroïne dans Kick-Ass côtoie ici un homme apparemment ordinaire, au passé trouble, qui devient son héros sans même qu’elle le devine. Fuqua joue sur ce registre de multiples manières. Par exemple, lorsque Robert McCall visualise, du fond de l’œil, tous les détails de la scène, avant de régler leur compte aux méchants. Il y a quelque chose du super pouvoir là-dedans.
Pour faire aussitôt un pied de nez à cette initiative, la rapidité du vieillard justicier est mise à mal par le chronomètre qu’il actionne avant de passer à l’action, action dont il surestime toujours la rapidité d’exécution. Autre choix scénaristique intriguant, Equalizer fait parfois penser à The Toolbox Murders, slasher de Dennis Donnelly, sortit en 1978, où le tueur tue avec des outils de bricolages. C’est en effet, à l’exception notable de ce film (et son remake réalisé par Tobe Hooper en 2004), assez rare et cela paraîtra à certain néophyte comme relevant de l’inédit. Dans le même ordre d’idée qui ravira les nostalgiques du cinéma d’action des eighties, McCall ne cesse de bricoler des pièges comme le ferait McGiver ou John McClane. Héros moderne, et en prévision d’une suite probable, McCall ouvre son ordinateur à la place de son livre pour conclure le film. Il vient de recevoir un mail lui demandant de l’aide. Le héros a pris goût à l’uniforme de redresseur de tort.
Equalizer est porté haut par des idées scénaristiques parfaitement assemblées et par la maîtrise de Denzel Washington en justicier incorruptible, impitoyable mais sensible.
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