Évacuons d'emblée les polémiques et autres lieux communs :
oui, la mise en scène d'Inarritu est d'une arrogance folle ; oui, DiCaprio mérite son Oscar. Mais oui, DiCaprio méritait cet Oscar bien avant (dans n'importe lequel des Scorsese, au moins) et sa performance ici sent bien trop la performance (c'est sympa de dormir dans des carcasses d'animaux, so what ?). Bon.
De son côté, Inarritu (certainement galvanisé par son précédent essai lui aussi largement oscarisé Birdman) met le paquet pour immerger le spectateur, sans recourir à la 3D mais en en obtenant quasiment le même résultat, parfois à la limite de la nausée. Plans-séquences vertigineux collant aux personnages, images fouillant la nature à la recherche d'une spiritualité, finalement absente car constamment ramené à des considérations plus physiques (où l'on revient à Léo - Léo se fait péter par un ours, Léo tombe d'une falaise, Léo échappe aux indiens, Léo se répare tout seul - Bref, un catalogue un peu vain qui ferait passer les mésaventures d'Ash dans Evil Dead pour petit lait), souligné par un hyperréalisme - la séquence de l'ours - qui petit à petit sort le spectateur de son immersion (ça a été mon cas).
Malgré des efforts louables pour essayer d'égaler le Terrence Malick de La Ligne Rouge et Le Nouveau Monde, et Le Dernier des Mohicans de Michael Mann, Inarritu ne parvient jamais finalement à créer un lien entre cette descente aux enfers et son caractère mythique, les dissociant sans jamais véritablement soit les unir soit les opposer.
Au final, THE REVENANT marque les esprits, bouscule, inconforte, mais peut-être pas pour les bonnes raisons. Si certains seront réceptifs à cet univers mortifère, d'autres seront plus réservés face à un objet formellement irréprochable mais manquant de puissance et de signifiance, étouffées paradoxalement par la suffisance de son auteur.