Un pur et vrai thriller quand l’époque en propose de moins en moins et pourtant des talents comme Denis Villeneuve pour la mise en scène de ce type de film, bien qu’ils soient rares, parviennent à redonner du sens au genre, en assumant pleinement sons statut. Ici, l’ambiance générale, le ton et le visuel porte totalement cette histoire, et même si ce style de scénario a déjà été éculé dans tout les sens, celui comporte absolument tout ce qu’il faut pour en faire un moment de haute tension et bien glauque qui plus est, car ce n’est pas l’histoire en elle même qui est la plus intéressante mais la manière très terre à terre dont celle ci est traitée, soit pas de concession dans les propos, le but étant de rendre ce qui se passe le plus dérangeant possible, et surtout pas de digression de genre. En effet le film commence directement à faire monter le stress, avec une stratégie classique dans les premiers instants afin de mettre en place l’intrigue et surtout établir l’atmosphère pesante qui va habiter tout le film, et cela ne se contente pas d’atteindre un point culminant d’angoisse pour rendre cela le plus abjecte possible mais petit à petit, des éléments de scénario sont parsemés régulièrement pour créer des piques soudains de tension, ainsi le film tout entier semble être en flux tendu de stress et d’horreur dans ce qui se passe aux différents personnages et sans pour autant verser dans le gore et le trash. C’est bien l’une des réussites de ce dont à quoi on assiste car toute l’horreur et l’inhumanité de ce qui peut être raconter ici est rarement illustrer par une horreur purement visuelle ou seraient mêlés hémoglobine et violence physique, bien au contraire l’ensemble de cet aspect est la plupart du temps suggéré ou alors montrer de manière subtile, donnant toute cette force obscure et très malsaine qui habite totalement cette intrigue, et les moments montrant l’horreur plus directement à l’image sont d’une très bonne qualité, tant par ce que ce peut traduire, montrer que par la qualité des maquillages et techniques pour illustrer cela physiquement, sans faire appel au nec plus ultra des effets spéciaux. Voilà aussi un aspect très appréciable de ce film, c’est à dire un traitement de l’image et du scénario de manière très classique, sans trop d’artifices visuels ou de détour scenaristique, on sent bien la volonté de D. Villeneuve de faire un thriller « à l’ancienne » jouant essentiellement sur l’ambiance et l’intrigue pour donner de la forme à ce qui se passe, ainsi chaque nouvelle évolution laisse planer ce sentiment de non maîtrise face à ce qui peut se passer! D’ailleurs l’intrigue est totalement maîtrisée, tirée au cordeau, amenant chaque élément de l’histoire à point nommer, sachant à la fois créer plus de surprise et à la fois maintenir l’état de tension dont le film fait preuve dès les premiers instants, et ainsi installer dans les meilleures conditions qu’il soit la vraie trame de fond qui s’en dégage, entre inhumanité , violence, colère, pression et surtout le doute, car c’est sûrement là que réside la plus grande partie de la force de ce film: a aucun moment et cela jusqu’au dernier instant du film on peut se douter à quoi cela tend à la fin, car bien que l’on pense la structure générale de l’intrigue élucidée, avec son lot de rebondissement de très grande qualité qui rythme l’ensemble du film, on est bien loin de la vérité même des les dernières poignée de minutes, vers quelle morale finale peut tendre alors que les événements liés à l’horreur de la situation sont déjà très parlants d’eux même, il est clair que l’attention reste jusqu’à ce dernier instant qui encore une fois reste totalement intriguant bien que le voile soit levé sur l’ensemble des mystères. Alors ce mélange de drame très sombre et n’hésitant aucunement à montrer le coté abjecte de certains actes ou la violence bien sale, et d’autant plus quand on a tout les clés de l’histoire en main, l’horreur psychologique prend immédiatement le pas, et ça c’est sacrément bien joué, car cela n’a rien d’évident à rendre à l’image, et c’est clairement ce savant mélange de rythme et de mystère le tout dans une mise en scène très soignée, ou le son d’ailleurs prend plus d’importance que la musique, très peu présente afin de renforce l’atmosphère bien pesante qui règne et surtout une capacité à surprendre à chaque instant et cela jusqu’à la dernière minute. Là où D. Villeneuve a réussi à superbe coup aussi, c’est évidement dans le casting car il a su trouver en chacun de ses personnages tel qu’il peut les voir en ses acteurs « fétiches », P. Dano portant un personnage pas simple à défendre par sa seule interprétation, et d’autant plus convaincant à souhait ou que ce soit à travers un J. Gyllenhaal tout aussi bon dans son personnage, lui aussi lui donnant toute sa force par le jeu (le tic dès clignements d’yeux est d’un réalisme presque troublant) et bien sûr par ce charisme indéniable quand il s’agit d’incarner des justiciers au grand cœur terre à terre, loin des imageries édulcorées dont font usages la plupart des thrillers basiques, et il a aussi cette force à porter à la fois la désapprobation du spectateur (au début du film, il est celui qui ne semble pas pourvoir comprendre la douleur de ces pères) pour petit à Petit devenir le vrai héros qui désamorce le problème de façon droite et la plus efficace finalement, bien que la colère fasse partie intégrante de son personnage. Mais bien évidement que celui qui semble le plus remarquable dans ce film, c’est H. Jackman, qui en plus d’avoir du mal à se sortir du carcan Marvel et Cie, reste bien trop rare dans des rôles « différents » de ce que lui connaît, mais il a en incarnant un rôle à la fois classique (un père énervé et à l’esprit de vengeance) mais tellement difficile à rendre intéressant, tant les réactions et actes qui en découlent sont rapidement jugés sur leur crédibilité, et là il faut dire que ce personnage donne aussi beaucoup de rythme à l’ensemble du film grâce à l’acteur qui explose à l’écran tout autant que littéralement. Une très bonne réussite sur tout les plans, et une véritable surprise en ce qui concerne le thriller, qui avait du mal à revenir à un pur intérêt pour le scénario plutôt que pour l’action et l’horreur pure, et surtout qui met une évidence la talent de D. VILLENEUVE quand il s’attaque à un genre, il parvient à le traiter d’une manière cinématographique qui n’est pas sans rappeler les grands films dans la même ambiance, presque 20 ans plus tôt, et l’ensemble de sa filmographie le prouve, chaque fois un genre nouveau, chaque fois un coup de maître toujours en respectant styles et codes, tout en apportant une originalité indéniable dans la manière de l’illustrer et de raconter.