Le Vagabond : les secrets du tournage

Avec Le Vagabond, le réalisateur Avishai Sivan a voulu parler de l'errance. Ainsi, selon lui, "le fait de marcher sans but donne lieu à un certain retrait de la vie et renforce une voix intérieure subersive.(...) Ces errances sont aussi des moments propices à la réflexion". Il a remarqué que de nombreux étudiants pratiquaient la marche, "pour économiser les frais de transports ou pour d'autres raisons". C'est le point de départ de son scénario.

La famille mise en scène dans le film est de confession juive orthodoxe, très radicale. On suit la crise de foi de Isaac qui est "une force motrice" pour lui, d'après le réalisateur. "J'ai beaucoup de respect pour la religion, et notamment pour la foi. D'ailleurs c'est davantage la foi qui m'intéresse, dans le film, que le milieu des religieux. Je respecte infiniment la dévotion des religieux (...) c'est aussi ce que j'essaie d'atteindre dans mon propre mode d'expression", confie-t-il.

Le réalisateur Avishai Sivan est un artiste plastique qui a auparavant fait du cinéma expérimental et un "journal intime cinématographique" qui ne l'est pas moins, The Soap Opera of a Frozen Filmmaker. Le Vagabond est son premier film "traditionnel".

Contrairement à beaucoup d'acteurs qui deviennent ensuite réalisateurs, le jeune Omri Fuhrer a commencé par réaliser des courts métrages puis est devenu comédien. Le Vagabond est son premier rôle au cinéma. Son rêve reste de devenir réalisateur.

Le cinéaste Avishai Sivan nous parle de son jeune acteur: "La productrice est tombée sur la photo du profil d'Omri sur Facebook et lui a envoyé un message. Encore lycéen, Omri s'apprêtait à entamer des études pour devenir réalisateur. Il n'était pas franchement tenté par le métier d'acteur, et, à mon avis, s'il a accepté d'interpréter Isaac, c'était uniquement pour se retrouver au plus près d'une caméra 35 mm."

La plupart des acteurs du films sont des non-professionnels. Avishai Sivan revient sur la façon qu'il a eue d'appréhender cette difficulté: "il m'a fallu être imaginatif dans ma direction d'acteurs. En revanche, leur dévouement a été incontestablement un grand atout, car ils m'ont permis de réaliser le film que je souhaitais (...) En tant que metteur en scène, les attitudes qui sortent du lot chez les comédiens m'intriguent, même si elles sont moins réalistes et naturelles. En ce sens-là, c'est très intéressant de travailler avec des non-professionnels. Ensemble, nous avons vécu une expérience unique. (...) on m'a parfois fait remarquer que l'interprétation n'était pas assez réaliste, mais pour moi, le plus important était d'obtenir quelque chose d'original."

Ali Nassar, qui joue le père d'Isaac dans le film, est lui aussi réalisateur. Il a même remporté le prix du meilleur scénario israélien au Festival de Jérusalem en 1997 pour son film, La Voie lactée. Il joue dans le film un juif orthodoxe alors qu'il est lui-même Arabe israélien.

L'actrice Ronit Peled est en réalité secrétaire comptable et n'a pris des cours d'art dramatique qu'à l'âge de 40 ans. Le Vagabond marque ses débuts au cinéma.

Shani Ben-Haim qui joue Dafna dans le film, fait elle aussi ses premiers pas au cinéma puisqu'elle pratique généralement la danse classique et moderne.

Pour que Le Vagabond puisse se faire, toute l'équipe du film a accepté de travailler bénévolement. "Cela a été un vrai parcours du combattant (...) On a demandé à l'ensemble des techniciens d'en faire plus que ce qu'ils ont l'habitude de faire sur des tournages. Par exemple, c'est moi qui conduisait le camion transportant le matériel, et c'est le chef-opérateur, Shai Goldman, qui réglait les éclairages sur les différents décors du film", explique le réalisateur.

Avec un budget aussi faible, on peut être étonné de voir que le film s'est tourné sur pellicule et non en numérique, format pourtant beaucoup moins cher. C'est sans doute là une part de l'exigence du technicien de l'image et de la matière qu'est Avishai Sivan: "je savais dès le départ qu'on tournerait Le Vagabond en 35 mm. La pellicule exige une précision technique. Returnee, court métrage expérimental que j'ai tourné en 16 mm avant The Wanderer, m'a beaucoup aidé pour jouer avec le langage et l'esthétique cinématographiques."

La monteuse du film, Nili Feller, est déjà à l'origine du montage du beau film animé israélien de Ari Folman, Valse avec Bachir.

Shai Goldman, le directeur de la photographie et producteur du film a déjà été à la tête de l'image du film La Visite de la fanfare.

Avishai Sivan a une conception toute particulière de l'étape du montage à laquelle il a participé sur ce film: "D'une certaine manière, le travail du monteur ressemble à une guillotine: il faut savoir quand couper et quand, au contraire, laisser le plan durer un laps de temps supplémentaire."