Xavier Dolan, présenté comme le nouveau Rimbaud du cinéma, a du talent, évidemment. Du style, surtout. Un style pop, doux-acide, où se mêlent les influences de Wong Kar-wai, Gus Van Sant ou encore Christophe Honoré. Ralentis planants, cadrages soignés, filtres de couleurs, décors et costumes fashion, bande originale hétéroclite (Dalida, Bach...). Tout cela est très beau, très tendance, mais aussi très maniériste. Xavier Dolan se regarde filmer (et jouer, puisqu'il est aussi acteur) avec une certaine complaisance.
Sur le fond, il y a également de la prétention à vouloir dresser, via de nombreux témoignages, une sorte de tableau de l'amour chez les jeunes d'aujourd'hui, patchwork amusant mais plus ou moins convenu. Quant à l'histoire principale, c'est une variation sur la rivalité amoureuse, déclinée ici en modes hétéro et homo, et centrée sur un même objet de fantasme : un Adonis séduisant et ambigu. Le réalisateur, cinéphile et littéraire, a beau convoquer de nombreuses références (Alfred de Musset, Thomas Mann et son Tadzio de Mort à Venise, Pasolini et l'ange de Théorème, Truffaut et ses Jules et Jim...), il ne fait qu'égrener les clichés de la relation amoureuse, de la cristallisation à la déception. Son ironie gentiment cruelle ne suffit pas à transcender le sujet. Et finalement, on se fout un peu de ces amours imaginaires et branchouilles, aussi joliment filmées soient-elles.