Voilà donc Godzilla, version 2014. Bon, ben franchement il y a clairement mieux, et même si on évolue dans un registre qui évite la comparaison avec le film de 1998, elle ne serait surement pas à son avantage, malgré tous les défauts que l’on peut trouver au métrage d’Emmerich (qui était franchement très bien dans son style et reste de très bonne facture aujourd’hui encore).
Coté casting on pouvait être surpris déjà de ne pas voir de grandes stars au générique (en sachant que le réalisateur est déjà un quasi débutant). Binoche gicle au bout de 10 minutes (probablement un mauvais choix scénaristique), Cranston plutôt prometteur avec une solide prestation au bout de 30 minutes, et les acteurs à suivre, comme Hawkins et Watanabe n’ont que des rôles secondaires. Alors on se demande qui il reste. Et bien Olsen, pas très présente et sans influence sur l’histoire, et Aaron Taylor-Johnson, qui hérite de tout le boulot. Pas forcément mauvais, il manque quand même de présence et d’affirmation pour ce film, et ceux qui avait critiqué Broderick à l’époque, franchement il n’est pas beaucoup mieux Taylor-Johnson, d’autant que Broderick correspondait alors au personnage qu’on lui avait confié. Là notre démineur ne fait pas grand-chose. En clair, c’est peu convaincant.
Le scénario est discutable. Le film est clairement trop court pour son sujet, il manque clairement de fluidité narrative (le début, oulà !), le film se passe sur toute la surface de la planète et ça devient vite le foutoir avec des ellipses en veut-tu en voilà. De surcroit, alors que le film d’Emmerich avait été tancé pour sa simplicité, ici il n’y a même pas un embryon d’explication à ce qui se passe ! Image d’archives au début, et puis paf, on se retrouve très vite avec trois monstres et c’est la débrouille pour le spectateur ! Non, ce n’est pas tenable. Autant dans le Monsters du même Edwards c’était viable, autant ici il fallait quelque chose de ce point de vue. Sinon, la pseudo-construction psychologique des personnages est laborieuse et très convenu. Enfin, Godzilla est dans le titre, dans le film on ne le voit en entier que trois fois, et pas plus de 5 minutes à chaque fois. Même la conclusion n’est pas convaincante, là où le film d’Emmerich se montrait émouvant. En clair, ce film réussi l’exploit d’être moins subtil que le film d’Emmerich en se voulant au contraire plus fin.
Techniquement on retrouve la patte d’Edwards qui avait été séduisante dans Monsters. C’est vrai qu’il a du potentiel, maintenant on voit aussi ses limites, car il fait des parties prit là encore viable dans Monsters, mais ici peu tenable. C’est tout de même difficile de ne pas prendre davantage de hauteur avec les créatures, de ne pas avoir une caméra plus nerveuse, et on s’enlise un peu dans les même travers que Cloverfield par exemple. Certes il y a de l’immersion et c’est agréable, mais se dégager du sol permet aussi d’avoir un spectacle plus grandiose et là, avec un tel budget il était malvenu de s’en priver. Pour la photographie je note un travail efficace. Un peu sombre par moment, mais rien de préjudiciable à l’image, et les décors sont de très bonnes tenues. Rien à dire de ce côté. Venons-en aux effets spéciaux. Certes les créatures sont très bien faites, même si on pourra en revanche discuter leur design respectif (il y a une scène où l’on voit les pattes de Godzilla, et je peux vous dire que ça fait pied de peluches !). Le monstre très « Cloverfieldien » croisé avec les créatures de Pitch Black en termes de look surprend au début mais finalement il n’est pas si impressionnant. Pour les scènes de destruction c’est à des années lumières du Godzilla d’Emmerich. Si vous voulez voir un monstre détruire des villes, plaisir coupable devant Godzilla, vous pouvez passer ici, car lorsque vous allez vous retrouver sur les lieux, Godzilla ou ses potes auront déjà fait tout le boulot. C’est très frustant, et là encore c’était une qualité dans Monsters, qui devient plombant dans ce genre de film. Niveau bande son, et bien c’est là aussi inférieur au film d’Emmerich. Ça manque d’ampleur, de majesté, d’épique, c’est trop passe-partout pour un film à 160 millions.
En clair Godzilla version 2014 est un film décevant, et je partais plutôt confiant après la belle surprise de Monsters par le même réalisateur. Il n’a clairement pas su faire le passage de l’un à l’autre, et même si ses qualités pointent parfois, ce n’est pas suffisant. Clairement moins spectaculaire que le film de 1998 que ses quelques améliorations techniques ne compensent pas, il est aussi moins rythmé, et finalement moins touchant. On a un produit froid et sans âme, Godzilla étant un pauvre lézard exploité ici, alors que la version de 1998 lui offrait un vrai rôle, une vraie personnalité, une vraie dimension, et cela en gardant le côté « gaffeur » de la bête, voir même le côté un soupçon « nanar » qu’a souvent eu la saga. 1.5.