Happy birthday to you, happy birthday to you !!!!!!!!! Cela fait 60 ans qu’il a terrorisé le Japon et ses habitants. 60 ans qu’il a lancé le genre des films de kaijus. 60 ans qu’il se frotte à divers adversaires qui sont devenus aussi célèbres que lui (Mothra, Rodan…), sans pour autant avoir une notoriété équivalente dans le monde entier. Et pour cet anniversaire dantesque, ce sont les Américains qui ouvrent le bal, tentant là où Roland Emmerich à louper son tir pour la majorité des fans du monstre et des cinéphiles : donner un lifting de taille, avec les moyens nécessaires, à Godzilla tout en gardant les bases de la saga. Second essai donc pour l’oncle Sam, pour regagner le cœur des aficionados ! Et autant le dire tout de suite : rester objectif pour cette critique va être un exercice difficile (étant donné que les films de destruction massive sont mes plaisirs coupables) !
Du coup, par quoi commencer ? Le scénario ? Les longs-métrages de ce genre n’ont jamais brillé par leur écriture (ne consistant qu’à voir un monstre gigantesque tabasser un autre, pendant que de pauvres humains insignifiants s’activent alors que l’on s’en fiche royalement). Honnêtement, il n’y avait que le tout premier Godzilla (celui de 1954) qui avait véritablement quelque chose à proposer. En voulant à tout prix mettre en avant la peur du nucléaire post-Hiroshima ainsi qu’une réflexion sur l’utilisation de l’armement. Ce Godzilla 2014 arrive-t-il donc à surprendre de ce point de vue ? Pas tout à fait. Nous avons-là un gros blockbuster qui doit passer par la case « présentation des personnages » pour pouvoir mettre en place ce qui est promis sur le papier (des titans et des villes en ruines). Remettant en cause l’utilité de certains d’entre eux, comme la femme du héros, qui ne sert finalement qu’à être un repère pour le spectateur lors des séquences de foule. Sans compter que nous avons droit à quelques moments dignes des films américains (les scènes héroïques, le militarisme, le happy end…). Cependant, malgré ces défauts, le scénario surpasse, et de loin, tout ce qui a été fait sur les films de kaijus.
D’une part en ce qui concerne les personnages. Jamais dans un tel film on s’était attaché aux protagonistes. Et cela, nous le devons à un travail d’écriture fort appréciable (qui les approfondis un minimum, notamment le père du héros), mais surtout aux comédiens. Qui, même s’ils n’ont pas spécialement une grande place dans l’histoire, s’en sortent superbement (en ce qui concerne les actrices, que ce soit Elizabeth Olsen ou bien Juliette Binoche). Arrivant à rester crédibles quelque soit la situation qu’ils doivent jouer (mention spéciale à Aaron Taylor-Johnson, qui délaisse son image de Kick-Ass). Avec, en tête, un Bryan Cranston inspiré et touchant, prouvant une nouvelle fois qu’il est un excellent acteur (la définition même qu’il peut aussi bien jouer de la comédie – la série Malcolm – que des rôles sérieux et dramatiques).
De l’autre, nous avons une très bonne utilisation du thème du nucléaire. Qui fait partie intégrante de la mythologie de Godzilla et devait donc répondre présent à cette version, même s’il n’est plus autant d’actualité que dans les années 50. La bonne idée du film est de le fusionner avec l’écologie, tout en présentant des références pour les deux thématiques (la destruction de la centrale fait penser à Fukushima, le raz-de-marée provoqué par Godzilla au tsunami de 2004). Ainsi, Godzilla et ses congénères ne sont plus des créations nucléaires, mais des êtres d’une autre époque qui ont réussis à survivre par leur alimentation en radiations (de tout genre). Induisant que nous en sommes l’origine et que, par ce biais, nous avons bouleversé la Nature. Qui doit être rétablie par Godzilla (tel est son rôle dans ce film, et non pas une créature avide de destruction). D’ailleurs, les monstres apparaissant dans ce long-métrage (laissons la surprise pour les autres) ne sont jamais considérés de la sorte, mais plutôt comme des animaux. Un point non négligeable quand on veut traiter d’écologie !
L’autre bonne idée de ce long-métrage est d’avoir laissé la réalisation entre les mains de Gareth Edwards. Cinéaste qui s’est fait connaître avec son premier film Monsters en 2010, qui a su convaincre les producteurs de lui laisser la lourde tâche de s’occuper du mythe Godzilla pour sa seconde réalisation, c’est pour dire ! Mais il y avait de quoi avoir peur. Et pour cause, on pouvait s’attendre à ce qu’un « petit réalisateur » se fasse happer par la machinerie hollywoodienne, livrant ainsi un film qui ressemble bien plus aux producteurs qu’à lui-même. À la grande surprise, Godzilla 2014 est bel et bien un film de Gareth Edwards, qui reprend la même mise en scène que Monsters, à savoir tout filmer à hauteur d’homme. Ce qui nous rapproche des personnages (également un autre point qui nous permet de nous y attacher) tout en donnant énormément d’ampleur, de grandeur aux monstres présents dans ce film. De ce fait, nous restons petits, impuissants et désemparés par les destructions dont nous devenons les témoins. Le tout filmé avec une énergie folle, pour ne jamais nous perdre.
Autre point positif avec le choix de Gareth Edwards : son respect envers Godzilla. The Amazing Spider-Man 2 (pour donner un exemple récent) se présentait comme une honte pour ce super-héros pourtant vénéré. Ici, c’est carrément un hommage qui est rendu ! Godzilla ne se montre qu’au milieu du film, certes, mais tout est fait pour nous le cacher et ainsi faire monter l’attente. Jusqu’à ce qu’apparaissent ses épines dorsales. Puis une de ses pattes. Et enfin cette caméra qui remonte doucement vers sa gueule, qui s’ouvre pour faire entendre son célèbre rugissement (brillamment modernisé pour ce film). Dès lors, on sait que le réalisateur a joué avec le mythe et ce que représente Godzilla pour les fans. Et des moments comme ça, le film en regorge ! Comme celui où le gros lézard se prépare à « lancer » son souffle nucléaire : ses épines s’allument petit-à-petit dans la brume, du bout de la queue jusqu’à la base du cou, et feu !! Et si vous n’êtes toujours pas convaincus pas ces arguments, il ne vous reste plus qu’à regarder le film. Et voir à quel point certaines scènes sont faites à ce que l’on s’attache à Godzilla (notamment quand celui-ci se retrouve en bien mauvaise posture). Prouvant que le statut d’idole du monstre a été conservé jusqu’au bout !
Est-il nécessaire de parler des efforts techniques qui ont été faits sur ce film ? Vous faire part du budget (au moins 215 millions de dollars) devrait vous convaincre. Mais précisons tout de même que les effets visuels sont aussi réussis que nous le promettaient les diverses bandes-annonces. Faisant largement oublier le côté LEGO des films originaux et de la vieillesse du film de Roland Emmerich. Suffisamment dantesques pour que les monstres soient crédibles à l’écran (au concept art réussi, même si pas mal de fans japonais n’approuvent pas le côté « balourd » de Godzilla, alors que cela renforce sa grandeur et sa puissance) et offrir au film des séquences apocalyptiques. Ces dernières étant, au passage, magnifiquement mises en valeur par le travail musical d’Alexandre Desplat, tout simplement grandiose. Et enfin, les effets sonores assurent tout simplement le spectacle (au Grand Rex, le sol vibrait quand Godzilla rugissait !).
S’il n’est peut-être pas aussi travaillé qu’un film de Christopher Nolan ou de Steven Spielberg (en ce qui concerne le scénario), ce Godzilla 2014 est exactement ce que l’on attendait d’une version américaine : une icône intemporelle visuellement améliorée pour un divertissement grand spectacle. On en prend plein les yeux, sans jamais s’ennuyer. Que demander de plus ? Pressé d’avoir une suite, c’est pour dire !! Après avoir vu ce film, vous en redemanderez à coup sûr !!