Difficile de cataloguer un film comme "chef-d’œuvre" avec si peu de recul. Il y a les "pour", éblouis par cette expérience unique et sans discernement, et les "contre", avare en compliments et souvent motivés par leur esprit de contradiction légendaire - "j'aime pas parce que tout le monde dit que c'est bien et que je suis pas tout le monde" - souvent ridicule, on en connaît tous des comme ça. Cependant, je ne prétends pas apporter une mesure à ces critiques, chacun peut le faire et certains le font très bien, mais comme je le peux, je vais donner mon avis. D'emblée, ce qui a gêné pas mal de spectateurs, ce sont les incohérences assez monstres qui parsèment le film. Alors certes, "Gravity" se veut ultra-réaliste et accumule les invraisemblances, mais le cinéma, comme son nom l'indique c'est du cinéma ! Quel film peut se targuer d'être réaliste de bout en bout, plus encore sur un tel sujet ? Pour le bien du film, les rebondissements et la dramatique générale, c'est essentiel que tout ne soit pas comme dans la réalité, le réalisateur l'assume parfaitement d'ailleurs. Reste le scénario que l'on dit "écrit sur un post-it". D'accord, mais, de temps en temps, ne vaut-il pas mieux se contenter de peu et le faire bien ? Je pense à nombre de films qui se compliquent la vie par peur d'ennuyer. Ici, le scénario est mince mais rempli d'intérêt. C'est une ode à la vie, au questionnement terrestre, humain dans le désert spatial. C'est le combat d'une femme, seule, perdue et désespérée. Alfonso Cuaron a su parfaitement retranscrire l'angoisse abominable du vide, de cette immensité spatiale où rien ne peut nous arrêter. Les plans-séquences sont majestueux, les vues terrestres uniques et sublimes. Visuellement, ce film est une révolution. Le combat de cette femme - ce qui me fait penser à "Alien" - est intense et prodigieux. C'est juste une énorme claque que l'on prend, visuellement et intensément. La bande-son peut paraître un peu grandiloquente, mais elle m'a semblé en parfait accord avec ce que l'on pourrait ressentir là-haut (Steven Price semble emprunter à James Newton Howard par endroits, bon choix). Certains moments donnent vraiment les frissons, ce vide intersidéral est fascinant et formidablement bien retranscrit. Que dire du visu de la terre... Fabuleux. Cette expérience est unique même si l'on ne peut oublier tous les défauts énumérés plus haut et le fait que ce film est fait pour le grand écran, avec des lunettes 3D. Eh oui...