La Femme du Vème, troisième film de Pawel Pawlikowski, a été présenté en avant-première mondiale au Festival International de Toronto en 2011.
C'est en ayant vu Ethan Hawke jouer au théâtre dans des pièces de William Shakespeare et Anton Tchekhov que Pawel Pawlikowski a voulu l'engager pour camper le personnage principal de La Femme du Vème.
Pour réaliser son film, Pawel Pawlikowski, élève de Krzysztof Kieslowski, s'est rappelé de ce que son maître lui avait confié un jour : "Tournez chaque film comme si c’était le dernier ! Ou alors faites autre chose !" Le réalisateur avoue avoir eu constamment cette pensée dans un coin de sa tête tout au long du tournage.
Après avoir réalisé de nombreux documentaires, Pawel Pawlikowski a voulu passer à la fiction en jouant sur l'ambiguïté et la poésie : "J’aime tourner à contre-courant", affirme-t-il.
Le réalisateur a passé beaucoup de temps avec son chef décorateur Benoît Barouh à chercher, dans les rues de Paris, des lieux inconvenants et incongrus. Ils désiraient un aspect de la ville qui ferait penser à une sorte d'Europe de l’Est des années 70 : "Au début je perdais espoir. Londres est plus imprévisible, on y trouve des zones non identifiables, des no man’s land", nous explique-t-il.
Le film suit le personnage de Tom Ricks au plus près, le réalisateur ayant voulu bannir tout point de vue omniscient qui insinuerait que le spectateur pense être en terrain connu. C'est un nouveau départ par rapport aux films précédents de Pawel Pawlikowski, dans lesquels il se sentait plus "général" et "panoramique" avec ses protagonistes.
Le tournage a principalement eu lieu à Paris, mais Pawel Pawlikowski déclare : "Paris n’est pas le sujet du film. (...) Paris dans ce film... ce n’est pas Paris. Ça pourrait être... Budapest !" Le lieu n'a ainsi rien à voir avec l'intrigue et ses projets de films, il sert seulement à construire une sorte de rêve : "J’aime beaucoup Paris, mais je ne le vois pas dans la vie comme je le montre dans le film", nous confie-t-il.
Pour l'auteur du roman Douglas Kennedy (II), le film La Femme du Vème est davantage un scénario personnel plutôt qu'une adaptation d'un livre.
Pour son précédent film, My Summer of Love, Pawel Pawlikowski était également parti d'un roman, dont il avoue avoir modifié de nombreux éléments. Pour lui, les livres sont un point de départ qui permettent de réaliser un film, lequel doit ensuite trouver sa propre logique.
Dans le livre de Douglas Kennedy, il y a de nombreux flashbacks, tandis que le réalisateur raconte tout au présent, sans rappel avec le passé : "Je m’intéresse à un cinéma de l’ici et du maintenant", affirme Pawel Pawlikowski. Ce présent a en effet pour but d'explorer certains mystères des personnages afin que le film suive la ligne logique d'un rêve : "Ça commence de façon réaliste, puis les frontières de la réalité se fissurent, petit à petit", explique le metteur en scène.
Il fallait, pour l'auteur, que le personnage principal (interprété par Ethan Hawke) ne soit pas un homme ordinaire, mais un héros complexe, ambigu et double. Il ajoute d'ailleurs : "Je voulais que le problème, ce soit lui, pas le monde qui l’entoure." Il s'agit là d'une différence majeure avec le roman d'origine de Douglas Kennedy.
Le personnage et son état d'esprit ont demandé un travail d'équilibriste de la part de l'acteur : "Nous ne devons pas perdre notre sympathie pour Tom, en même temps on ne peut pas lui faire entièrement confiance", déclare Pawel Pawlikowski. Cette approche du personnage est courante en littérature, le réalisateur avoue avoir voulu le rendre attachant, aimable mais soupçonneux.
Pawel Pawlikowski explique que le personnage de Tom Ricks est perdu dans tous les domaines de sa vie : "Dans son travail d’écrivain, il n’est ni sincère ni inspiré. Son couple a explosé. Il éprouve un véritable amour paternel pour sa fille mais il ne sait pas comment l’exprimer." Le réalisateur avoue avoir été poussé et aidé par ce point de départ du livre de Douglas Kennedy (II), et qui lui permettait de jongler avec de solides pistes.
Pour réaliser son film, le réalisateur cherchait un point de départ qui trouve sa propre logique interne sans s'empêcher de s'écarter de l'idée de départ. Il a très vite pensé au roman de Douglas Kennedy en se disant : "Et si on prenait cette histoire à contre-courant, si on remettait tous les ingrédients sur la table ?" Avec l'histoire du personnage de Tom Ricks, écrivain américain, il voulait raconter sa désintégration psychologique, l'histoire d’un homme qui devient schizophrène.