Après avoir critiqué Last Caress, je m’attaque donc à Blackaria, l’autre métrage du duo Gaillard-Robin. Bon, c’est vrai que la bande annonce laissait envisager un métrage supérieur (que le duo livrera avec Last Caress), mais enfin le résultat est très correct malgré tout. Avec un budget minable, l’équipe du film fait un travail de belle qualité, original et louable.
Je commence par l’interprétation. Bon, celle-ci, comme dans Last Caress n’est pas top, mais les acteurs sont amateurs. Un peu d’indulgence est donc de mise, car en dépit de leur inexpérience, le résultat est acceptable. Anna Naigeon est très convaincante dans son rôle de nymphomane assez louche, Clara Vallet et Aurélie Godefroy sont magnifiques à défaut d’être très juste. Dans l’ensemble elles dégagent une réelle sensualité, et après tout dans un giallo, c’est là surtout que réside la prestation d’une actrice. Mon bémol va aux acteurs masculins, pas au top, notamment le policier au début qui fait tâche avec son style vieux flic des années 60. Heureusement Blackaria est porté par les femmes !
Niveau scénario, bon le film fait un peu le minimum. C’est pas toujours bien rythmé, mais le film est court et il y a de belles pointes de nervosité, mais l’histoire n’est pas très enthousiasmantes (elle n’est pas très clair non plus, mais je trouve que c’est plaisant de se perdre par moment) et elle manque de fluidité. C’est trop haché, en somme, avec des transitions pas assez soignées. Toutefois ce n’est pas là que j’attendais Blackaria, mais sur le visuel. J’ai été satisfait. Avec trois fois rien, les réalisateurs font du très bon boulot (qu’ils développeront encore davantage avec Last Caress). Les décors sont assez limités, faute de moyens bien sur, mais alors la mise en scène et la photographie, c’est génial. La première est excellente, s’apparentant plus d’une fois aux maitres du giallo (la scène de l’ascenseur est sidérante de maitrise). Il y a des effets de style, des cadrages bluffants, qui renvoient réellement aux bonnes pépites italiennes des seventies. Pour ma part le travail du duo Robin-Gaillard est le seul jusqu’à maintenant qui m’a clairement fait penser à Bava et Argento. Néanmoins la photographie est pour beaucoup dans cette sensation. Quel boulot encore une fois ! Il me semble que c’est d’ailleurs Anna Naigeon qui s’en est chargée. Époustouflant, vraiment ! Ce n’est pas toujours parfait bien sur, mais quelle originalité, quelle recherche pour se différencier du tout venant ! Les éclairages, les contrastes, les effets de flou, le rendu des couleurs, tout est minutieusement réfléchi. Il est possible de ne pas aimer, mais comment nier la réalité du travail qu’il y a derrière ? Dans son genre une indéniable réussite.
Je ne passerai pas non plus sur les effets horrifiques, très réussis et toujours exploité avec intelligence. Enfin, la musique évidemment, Double Dragon livrant un travail enormissime, du niveau de celui de Last Caress. Blackaria doit beaucoup à sa bande son (le chanteur qui interprète la seule chanson du film a une voix par ailleurs sublime).
Pour conclure, ce film est pas mal du tout. J’aurai pu pousser jusqu’à 3.5 étoiles, mais trouvant Last Caress supérieur et lui ayant déjà attribué cette note, je me restreindrai à 3. Il vaut le détour, ne serait-ce que pour encourager la petite équipe presque entièrement amateur qui a bossé dessus, et qui donne beaucoup, avec trois fois rien.