Pierrot a été heureux au Café du Pont où il a vécu une partie de son enfance en compagnie de son jeune frère et de parents modestes, laborieux, très unis et aimants. Bien des années plus tard, devenu Pierre, célèbre et riche, il se souvient et écrit son autobiographie qu'il intitule justement "Le café du Pont". Manuel Poirier en réalise aujourd'hui l'adaptation pour le grand écran. La scène est dans le Tarn-et-Garonne de la fin de la guerre (quelques difficultés avec l'Occupant pour les bistrotiers) et du début de la Quatrième République (le bistrot connait une modeste prospérité, et Maurice, le père, réalise même son rêve : ajouter à l'établissement une salle de bal). Mais Claudia, la mère, est usée prématurément par le travail (jamais un jour de repos) et le café doit être revendu pour lui permettre de recouvrer la santé - l'infatigable Maurice devient commerçant ambulant, faisant le tour des fermes pour y placer tissu et linge de maison - heureuse époque où l'activité était à son zénith, aucune difficulté de reconversion pour les courageux - tout en n'oubliant pas sa passion des voitures, qu'il répare à ses moments perdus et revend !!!! Belle famille, terroir pittoresque, tout cela est idyllique quelque part, et bien édifiant. Poirier aime la campagne et cela se voit spécialement ici, où sa caméra s'attarde sur les mille petits riens de la ruralité passée (ainsi de la pêche au gardon, du trappage des écrevisses, de la cueillette des champignons... et j'en passe, dans le bucolique), mais justement, à collectionner les riens, on assiste médusés à une surenchère du .... rien. Cela tient plus de l'album de souvenirs (bourratif) que de la chronique animée qu'on aurait espéré (l'ambiance "café" est nettement sous exploitée, en dépit du titre). Une étoile pour Campan, qui confirme son talent dans le rôle de Maurice. Au fait, aux dernières nouvelles, l'auteur du "Zizi" a détesté : il attendait de la gouaille là où Poirier n'a mis que (trop de) tendresse.