Ce film est un peu l'exemple de ce que devrait être un éventuel cinéma "antiraciste", c'est-à-dire un cinéma qui est certes radical, mais qui ne va pas faire la morale de manière larmoyante et qui ne va jamais sacrifier un premier degré vraiment intense au profit d'un certain message bienpensant.
Parce que White Dog est vraiment un film intense, avec de vrais moments de spectacle, où la musique (ou son absence), la mise en scène, l'utilisation du ralenti, les acteurs, tout est là pour que tu ressentes cette tension jusqu'à qu'elle devienne limite insoutenable.
C'est donc l'histoire d'un chien qui attache les noirs qui est recueilli par une jeune comédienne qui a décidé que porter des soutifs c'est tellement 70's. Et le reproche que j'aurais à faire au film est là, c'est limite trop beau pour être vrai, on sent que c'est du cinéma dans la mécanique d'écriture. Parce que ce chien va la sauver d'un violeur dès les premières minutes du film, donc forcément elle s'attache à lui. Ce qui explique donc pourquoi elle garde son chien qui attaque les noirs et veut tout faire pour le guérir. Bon après c'est du détail.
Mais pour moi la vraie qualité du film est comme je l'ai dit son intensité, cette façon que peut avoir Fuller pour que tu vibres, que tu ne saches pas ce qui va passer, que tu aies toujours ce doute en tête de que va faire le chien, est-il entrain de guérir ? Ne va-t-il pas arracher la tête du premier venu ? Et ça fonctionne d'autant mieux que Fuller utilise tout son talent de metteur en scène pour le faire, mais il le distille avec parcimonie, ce qui a pour effets de rendre l'attaque, le doute, encore plus violent.
J'aime me poser la question lorsqu'on voit ce chien courir et que l'on ne peut pas différencier s'il attaque ou s'il vient juste faire câlin, parce qu'on a ce doute. Et le doute je trouve ça formidable, ça veut dire qu'on est face à l'inconnu, que moi spectateur, pour une fois, ne sait pas ce qui va arriver. Forcément voir ça, ça prend aux tripes.
Quant au message antiraciste, il n'est jamais lourd et ceci malgré que le film soit assez manichéen (d'un côté les bons pas racistes et de l'autre les méchants raciste). Il n'est pas lourd parce que le film ne montre pas un type être un salaud, mais les conséquences de son inhumanité, de sa cruauté, qui l'ont poussées à créer quelque chose de totalement absurde et dévastateur. Parce que ni le chien ne mérite de se faire abrutir de la sorte, ni le noir ne mérite de se faire déchiqueter (la puissance du hors champ).
J'ai cependant peut-être préféré Shock Corridor, mais ce film là n'est pas en reste.